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Vidouze
des origines à la Révolution.



De R.ANCELY



(© ADHP - A 303)


(Monographie offerte par M. Alain Eymard)

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de Marie-Pierre Manet


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DES ORIGINES A LA RÉVOLUTION DE 1789

L'historien est souvent embarrassé quand il recherche la vérité et la précision de sa documentation. Les guerres du Moyen-Âge, les incendies de dépôts d'archives privées ou publiques, l'obligent à se borner et à ne donner souvent que des textes imparfaits qui ne se relient pas entr'eux. Ces difficultés s'aggravent lorsqu'on veut étudier les petites seigneuries locales, vestiges et survivances de l'époque médiévale. Cette première partie de l'histoire de Vidouze qui commence au XI e siècle ne peut donc poursuivre qu'un but modeste et établir simplement avec objectivité le résultat de recherches recueillies à des sources authentiques.


A - Essai sur les seigneurs de Vidouze :


Comme nous l'avons déjà exposé, Vidouze et une commune du canton de Maubourguet, sise dans les Hautes-Pyrénées. Géographiquement, elle appartient au pays dit de "Rivière-Basse", c'est à dire, de la vallée inférieure de l'Adour ; en effet, le ruisseau du Louet, qui la traverse au levant, va se jeter dans ce fleuve aux abords de Castelnau.

Dans un des plus anciens documents sur cette région (Enquête sur la Bigorre de l'année 1300 publiée par C. BALENCIE, Paris, Champion 1844), la terre et baylie de Rivière comprenaient à cette époque le bourg de Maubourguet, Castelnau-Rivière-Basse, le Château de Ladevèze, Sauveterre, Auriébat, Mazères, la moitié du bourg de Tasque, le quart de Golyte et Villefranque. Vidouze en faisait-il partie aussi à cette époque ou antérieurement ? L'histoire s'accorde-t-elle sur ce point avec la géographie ? C'est une question que nous étudierons plus loin.

La seule race connue des seigneurs de Vidouze a été indiquée par MARCA dans son histoire du Béarn. Au Tome II (Édition DUBARAT p.279), il déclare :

"Parmi les barons du Béarn, il y avait les seigneurs de MIRAMONT et de BIDOZE. Ces deux derniers villages ont été distraits de la terre de Béarn, il y a environ 300 ans".

Quelques pages auparavant ( p.p 272, 273), il avait déjà écrit :

"On trouve, dans les vieux fors, trois établissements de la Cour Majour... avec l'avis des Jurats de la Cour de Béarn dont le dernier est Narnaud de Bidoze avec cette qualité de Jurat de la Cort de Béarn. De manière que l'on ne peut révoquer en doute que le seigneur de Bidose ne fut en ce temps l'un des douze Jurats et que, par conséquent, le village de Bidose ne fut compris dans le territoire de Béarn, puisque d'ailleurs on trouve en divers actes Bruno et Auger de Bidoze assistants et signés parmi les autres gentilhommes et vasaux de Gaston et Centulle, son fils, quoique ce village et celui de Miramont soient distraits de la juridiction et paiis de Béarn à l'occasion de guerres échangées ou autrement".

Cette double affirmation de MARCA est exacte en ce qui concerne l'existence des seigneurs de Vidouze, car nous retrouverons leur trace dans de nombreux documents ; par contre, son opinion que, à cette époque, Vidouze faisait partie du Béarn ne saurait plus être admise d'une manière certaine. La critique historique a fait des progrès depuis cet auteur, et ROGE, dans ses Fors de Béarn (p. 84, note 31) (1) a démontré que le seigneur de Miramont, cité ci-dessus par MARCA concuremment avec celui de Vidouze, n'était pas baron de Béarn au titre de ce village, sis en TURSAN ; mais bien parce qu'il possédait des terres nobles en Béarn à Claracq, Idron et Baudreix dès l'année 1079. Il est donc possible qu'il en fût de même pour les seigneurs de Vidouze ; le fait cité par MARCA que Bruno et Auger de Vidouze vendirent vers 1122 aux Clers de Ste-Christine (hôpital sis en Espagne près du Col du Somport) une grande étendue de terrain, sise à "Nai" en Béarn, laisserait supposer que ces seigneurs étaient également possesseurs de domaines béarnais. Certains auteurs persistent cependant à penser que Vidouze pouvait être béarnais. L'Abbé MARSEILLON dans son Histoire du Montanérez (Abbé MARSEILLAN - Histoire de Montanérez - PAU Ribaut 1877) déclare que le village de Lahitte-Toupière (ainsi que l'indique son nom de Hitte : pierre, borne), séparait la Bigorre du Béarn, ce qui rejetterait Vidouze en Béarn. De même Cardeillac et Rosapelly dans "La Cité de Bigorre" (Rosapelly N. et Cardaillac (X. de) - La Cité de Bigorre - Paris Champion 1890) publient une carte de la Novempopolanie au V e siècle où figure Lahitte-Toupière, Vidouze paraît bien s'y trouver, mais rattaché à la peuplade des Bénéarnenses.

BATCAVE, dans la Revue Historique et archéologique du Béarn et du Pays Basque (Année 1934, page 184) a écrit les Vics du Béarn d'après les Fors ; analysant et commentant le Vic d'Anoye, il y fait entrer la communauté de Vidouze ; mais il ne donne que MARCA comme référence. Or nous avons vu déjà, ci-dessus, que l'opinion de cet historien ne saurait être admise sans réserve. Enfin Vidouze ne faisait pas, non plus, partie de Montanérez, et, dans son ouvrage précité, l'Abbé MARSEILLAN précise que ce village était limitrophe de ce dernier pays et que s'il lui appartenait au point de vue spirituel, la paroisse dépendait du diocèse de Tarbes.

En résumé, aucun document probant ne peut confirmer l'affirmation de MARCA sur l'appartenance de Vidouze au Vicomté du Béarn avant l'année 1300 et à partir de cette date, la communauté se trouve incorporée à la Rivière-Basse et par voie de suite au Comté d'Armagnac.


La succession des divers seigneurs directs de Vidouze paraît, en tous cas, établie comme suit :

1096 - Per ou Pierre de Vidose assiste, à St-Pé à la dédicace de ce Monastère à St-Pierre et St-Paul (Marca t.II P.28).

1122 - Bruno et Auger de Bidose vendent une terre dite "Nai" à l'hôpital de Ste-Christine (Marca Édition Dubarat t.II p.272 et suivantes).

1190 - Lob Gasie de Bidose et Per de Vidosa sont otages d'Arnaud de Montaner dans le traité de paix qui intervient entre ce seigneur et Bernard de Castelbajac (Archives Basses-Pyrénées, série E.306).

1205 - Un seigneur de Bidose est caution d'un traité entre Gaston et Ramon Garsie de Navailles (Marca t.II P.255).

1278 - Un baron de Vidouze remplace le seigneur de Mirepeix à la Cour Majour (Marca t.III p.p. 272, 273).

1286 - Narnaud de Bidose, Jurat de Béarn, prête serment de fidélité à Marguerite de Moncade et Roger de Foix (Archives des Basses-Pyrénées - Série E. 292).

1289 - Le même Arnaud de Vidouze, Jurat de la Cour de Béarn, est témoin d'un acte entre Gaston VII et sa fille Mathe, comtesse d'Armagnac et Guillelme de Moncade (Archives Basses-Pyrénées - Série E.293).


Arnaud de Vidouze est le dernier seigneur direct connu de cette localité et il en exerçait les prérogatives encore au moment de l'enquête de 1300. Nous devons toutefois rappeler que cette enquête mentionne, en outre, deux autres seigneurs qui ont des droits sur cette localité ; Sanche de Larreu et l'abbé de Larreule. En ce qui concerne le premier, nous retrouvons sa descendance jusqu'en 1549. En effet, dans un document dont il sera question plus tard, Jacques de Larreu est appelé coseigneur de Vidouze et assiste au serment de fidélité prêté à Henri III de Navarre par les habitants de cette communauté ; il est spécifié dans l'acte, que ce serment est prêté, sans préjudice des "honneurs, autorités et droits" appartenant iceluy dit ce seigneur". C'est le dernier document authentique où le seigneur de Larreu est mentionné. Si la famille a disparu, du moins elle a donné son nom à un quartier de la commune indiqué au cadastre et à une maison qui existe encore dans le village. Quant à l'abbé de Larreule, seigneur de Moulonguet, nous le retrouverons ultérieurement. En tous cas, à partir du XV e siècle, Vidouze va être partagé en un certain nombre de seigneuries particulières dont les pouvoirs et les limites seront difficiles à déterminer. Pour plus de clarté, nous diviserons la suite de cette étude en cinq sections.

Les seigneurs de Lascazères, Sombrun et Vidouze



Dans les archives du château de Lascazères (Hautes-Pyrénées), voisin de Vidouze, nous avons trouvé des documents fort importants, réunis au XVIII e siècle par le marquis de Franclieu et deux seigneurs, ses voisins, pour défendre leurs intérêts contre un arrêt de défaut du Conseil d'État du Roi qui, les considérant comme usurpateurs du divers de leurs domaines, en avait ordonné la revente aux enchères au profit de l'État. La contestation portait, notamment, sur Lascazères au Marquis de Franlieu, Sombrun au seigneur de ce lieu et Vidouze au Comte de Parrabère. Le mémoire déposé au conseil d'État pour demander annulation de l'arrêt de défaut, indiquait tous les titres de propriété sur lesquels se basaient les trois opposants pour établir leurs droits légitimes. Le mémoire débutait ainsi :

"Les terres de Lascazères, Sombrun et moitié de Vidouze sont des fiefs particuliers situés dans le pays de Rivière ; ils étaient possédés sous la mouvance des Comtes d'Armagnac, qui n'avaient concédé que la basse et moyenne justice et la directe".

Après avoir donné des précisions que les seigneuries de Lascazères et de Sombrun, en 1319 et 1321, le mémoire ajoute :

"Dans le siècle suivant, il paraît que les terres de Lascazères, Sombrun et la moitié de Vidouze se trouvaient réunies dans la maison de Barbazan-Faudoas".

Les preuves données par le mémoire sont les suivantes :

1 º - Le 11 avril 1450 et par acte de Lahonne, notaire royal de Ladevèze, Gérard de Barbazan-Faudoas vend les dites terres à noble Pierre de Forgues avec la justice basse et moyenne, les fiefs, rentes, dimes, etc... moyennant 3.000 écus d'or ;

2 º - Par testament de noble Jean de Forgues, retenu le 1 er février 1575 par Lembège, notaire de Larreule, l'usufruit de ces terres est donné à Catherine de Forgues, sa sœur et à Arnaud-Guilhem de ST-Lanne, son neveu"
.

Au début du XVII e siècle, ce même domaine est en possession du Roi Henri IV sans que le mémoire ait pu déceler en vertu de quelles circonstances il en était devenu propriétaire. Mais les preuves authentiques de ce droit de propriété abondent. En effet, le 4 Novembre 1599, une lettre de cache du Roi, datée de St-Germain, ordonne à Bertrand de la Valade, Président le la Chambre des Comptes de Nérac et au Procureur Général du Comté d'Armagnac de vendre des biens aux enchères. Cette Commission est enregistrée à la Chambre des Comptes de Pau le 13 Juillet 1600. L'arrêté ne subsiste plus aux archives des Basses-Pyrénées, mais il est mentionné dans un autre arrêt, du Parlement de Navarrre, du 12 Juin 1728, à la suite du dénombrement de ses terres fait, à cette époque, par le Marquis de Franclieu (Archives Basses-Pyrénées -Série B.5734) En conséquence de la lettre de cachet d'Henri IV, les terres sont vendues et acquises pour la somme de 12.000 livres par noble Pierre de Caussade.

Le 18 Mars 1604, ce seigneur représente la quittance de versement des fonds aux Commissaires du Roi qui lui passent contrat de vente des terres de Lascazères, Sombrun et moitié de Vidouze sous réserve de l'hommage d'une paire de gants pour la moitié de Vidouze que le sieur de Caussade sera tenu de payer à sa Majesté comme Comte de Bigorre. Cette dernière qualification n'a rien d'étonnant puisque la maison de Barbazan-Faudoas, d'où provenait le domaine, était un fief particulier de ce Comté.

Il est donc établi par l'ensemble de cette documentation qu'une partie de la communauté de Vidouze passe du XV e au XVII e siècle de la maison de Barbazan-Faudoas aux seigneurs de Forgues ; ensuite à Henri IV et par voie d'enchères à noble Pierre de Caussade. Dans la suite et par alliance, le domaine tomba en mains de la famille de Busca, ce dernier en devint le légitime seigneur. Le mémoire indique que si la famille de Franclieu est restée propriétaire de la seigneurie de Lascazères, les auteurs de l'exposant ont revendu leurs droits que la moitié de Vidouze aux auteurs du Comte de Parrabère à une époque indéterminée. cette vente remonte à une époque antérieure à 1728 puisque, à cette date, nous avons déjà un arrêt du 12 Juin du Parlement de Navarre donnant acte au Marquis de Franclieu du dénombrement de ses terres, et Vidouze n'y figure plus. La Comte de Parrabère est donc resté le seigneur incontesté au moins de la moitié de Vidouze jusqu'à la Révolution de 1789. De nombreux documents d'archives l'établissement et notamment le rôle des vassaux d'Armagnac établi en 1773 où figure le Comte de Parrabère pour la terre et seigneurie de Vidouze (Archives Basses-Pyrénées - Série B.5591). Un des représentants de cette maison au XVIII e siècle paraît être :

"Haut et Puissant seigneur Louis de Barnabé de Beaudéan, chevalier, comte et seigneur de Parrabère et Pardeillan, seigneur de Borau et autres lieux, chevalier de l'Ordre de St-Louis, habitant à Paris, rue Louis le Grand, paroisse de Saint-Roch".

(Acte retenu par Me Lamothe, notaire de Vidouze du 30 Janvier 1768, aux minutes de Me Carrère, notaire à Maubourguet).

Son fils Alexandre, César, est né en 1766 et a été vraisemblablement le dernier seigneur de Vidouze avant la Révolution. L'origine des Comtes de Parrabère remonte au XV e siècle. A cette époque, Arnaud de Momas, cadet, reçoit en partage la terre de Parrabère et fonde la branche des Comtes (La Chesnaye-Desbois - Dictionnaire de la Noblesse).

Dans l'état des paroisses du diocèse de 1783 - Tome II L577 (Archives municipales de Tarbes), le curé de Vidouze, répondant au questionnaire de l'Évêque, écrit que le Comte de Parrabère est seigneur de Vidouze. Il possède dans sa contrée des moulins, des fiefs, des bois à haute futaie dans quatre paroisses toutes attenantes. Il est haut justicier ; de cette justice on va à Lestoure et de Lectoure au Parlement de Toulouse. Il est à remarquer que l'assertion du curé sur la haute justice est sujette à caution. Henri IV n'avait vendu les terres qu'en moyenne et basse justice et nous ne trouvons pas de document établissant que dans la suite les Comtes ont acquis la haute justice.

Le 21 Mai 1549

"L'an 1549, le 21 Mai, au lieu et chateau de Vidouze, Jean de Rivière, vicomte, seigneur de Labatut, commissaire député par Henri, Roi de Navarre, Comte de Foix et seigneur de Lautrec, d'une part ; et la communauté de Vidouze, d'autre part, en présence de deux bailes et trois consuls et de la majeure partie des manans et habitans".

Le dit commissaire expose que :

"Noble Dame Claude de Foix, Dame de Lautrec et un sieng enfant qu'elle avait procréé avec le Comte de Martigues, s'en sont allez de vie à trépas, par quoy les biens et seigneuries de la maison de Lautrec sont escheuz au dit Roi de Navarre".

En conséquence, le Vicomté de Rivière donne connaissance à la communauté de Vidouze des lettres patentes de sa commission pour recevoir au nom du Roi de Navarre le serment de fidélité que les habitants prêtent incontinent (Fabas, notaire à Vidouze - Archives Basses-Pyrénées - Série E.506).

Nous n'avons pu retrouver à quelle date, ni en vertu de quels actes, une part de Vidouze était échue aux seigneurs de Lautrec. Le Comté de Lautrec sis dans le département du Tarn, à quelques kilomètres de Castres, appartenait à la maison de Foix-Béarn, Pierre de Foix, second fils de Jean et de Jeanne d'Albret (cette dernière n'est pas la mère d'Henri IV) eut en partage les vicomtés de Lautrec et Villemur par testament de son père en 1429. Il se maria la même année avec Catherine d'Astarac. Leur fils, Odet, eut eu une fille, Claude de Foix, qui avait épousé le Comte de Martigues, par suite du décès de cette dernière et de son fils, le Comté de Lautrec revint à Henri d'Albret (1517-1555), père de Jeanne d'Albret et grand-père d'Henri IV. Et c'est ainsi que, en dehors de la part de Vidouze dont ce souverain avait hérité par les Barbazan-Faudoas et la famille de Forgues, une nouvelle portion lui échut au titre du Comté de Lautrec. Ces deux portions constituèrent la moitié de Vidouze vendue en 1600 à M. de Caussade.

Au début du XVI e siècle

La situation de la communauté de Vidouze va encore se compliquer par la découverte d'un procès qui, au début du XVI e siècle va opposer, pour les droits seigneuriaux de ce village devant le Juge de Fézensac, noble Archambaud de Rivière et le Procureur du domaine d'Armagnac requérant pour le Comté placé alors sous séquestre par le roi Louis XI (Archives des Basses-Pyrénées - Série E.287).

Le procès débute le 7 Juin 1507 ; nous ne le connaissons que par des pièces de procédure et l'audition des témoins ; la décision du Juge ne figure pas au dossier et ne paraît pas avoir été conservée dans un dépôt d'archives. Quoique l'issue n'en paraisse guère douteuse (la balance de la Justice aurait dû pencher en faveur du Comte de Rivière), elle ne nous intéresse pas autant que les arguments développés par les parties et qui vont ajouter une enigme presque insoluble aux conditions de partage de la communauté de Vidouze.

C'est le Procureur du domaine d'Armagnac qui est demandeur. Pour prouver les droits du Comté sur partie de Vidouze, il établit par des registres de comptes du Receveur d'Armagnac que celui-ci a, à diverses reprises, perçu les droits de fief sur cette communauté. Mais les témoins qu'il produit se retournent contre ses assertions. Tout en reconnaissant certaines perceptions faites au profit du Comte d'Armagnac, ils certifient que, depuis une époque très ancienne (début du XV e siècle environ), il était de notoriété publique, dans cette commune, que la moitié de Vidouze était indivise entre le seigneur de Barbazan et le Comte d'Armagnac. De plus, ils affirment que ce même Comte a fait donation de sa part de seigneurie à noble Guiraud de Rivière qui en transféra la souveraineté à son fils Bertrand et au successeur de ce dernier, Archambaud. Et celui-ci, partie défenderesse au procès, va produire le titre de donation qui date du 8 Juillet 1439. Ce titre est formel. Jean V d'Armagnac, reconnaissant les éminents services que lui a rendus son ami et fidèle escuyer Guiraud de Rivière, lui fait donation entre vifs pour lui et ses enfants mâle de la part, parcelle et portion qui lui appartient dans le lieu de Vidouze. Le procès est donc jugé par cet acte de donation et voilà un nouveau seigneur de Vidouze qui va s'ajouter à Barbazan-Faudoas, à leurs successeurs et aux vicomtes de Lautrec. Nous pourrions arrêter là notre analyse de ce procès s'il ne soulevait une opposition absolue entre la situation qu'il expose et l'acte de 1549 rapporté ci-dessus et qui attribue une part de Vidouze aux Comtes de Lautrec. Si le procès de 1507 harmonise la possession d'une moitié de Vidouze en indivision entre les Barbazan et les lautrec et permet plus tard sa réunion sur la tête d'Henri IV, on comprend mal comment le Comté d'Armagnac a pu, à un moment donné, se substituer aux droits de la famille de Lautrec pour assigner Archambaud ; car c'est bien au nom des Lautrec qu'agit le Procureur du domaine ; en effet, dans la procédure le baile qui y figure et représente le demandeur est qualifié, en propres termes, de :

"Jean de St-Germain, baille de Vidouze, pour le Comte de Lautrec".

Donc, Armagnac, sous séquestre, argumente et plaide pour la part des Lautrec. Comment pouvait-il le faire en 1507 et prétendre excercer ainsi les droits d'une famille qui n'est pas dépossédée de ses prérogatives sur Vidouze puisque, quelques quarante ans après, en 1549, cette communauté passe de la succession des Lautrec où elle est donc restée, sur la tête d'Henri d'Albret, grand-père d'Henri IV ? Il ne saurait être question ici d'examiner une question de parenté, d'alliance ou de mariage. La maison de Lautrec, fondée ainsi que nous l'avons exposé, par une branche cadette des Comtes de Foix, subsiste jusqu'en 1540 et si l'on ne peut établir à quelle date exacte Vidouze est entré en partie dans les fiefs de cette famille, du moins sait-on qu'il n'en est sorti que par la mort, sans postérité, à Claude de Foix, dernier représentant des Lautrec.

Nous croyons qu'il faut rechercher la solution de cette enigme dans une question de souveraineté. La Rivière Basse appartenait en entier au Comté d'Armagnac dès le XV e siècle. Les seigneurs particuliers qui la peuplaient étaient donc vassaux du Comte d'Armagnac et n'exerçaient sur leur fiefs que les droits que leur suzerain supérieur leur avait concédés. Les vicomtes de Lautrec n'échappaient pas à cette règle et il paraît naturel qui si, à un moment donné, le Procureur du Domaine d'Armagnac a eu la conviction qu'Archambaud de Rivière avait usurpé les droits des Lautrec, il appartenait au Comte d'Armagnac de protéger son vassal et de réclamer en son nom. En fait, il n'y avait peut-être, dans ce procès, qu'une question fiscale en jeu. La procédure indique que le receveur des Domaines d'Armagnac percevait des droits sur Vidouze ; il produit des registres de recettes qui en font mention ; les témoins, interrogés par lui, déposent également sur ce point. L'instance engagée devant le juge de Fézensac avait probablement pour but principal d'empêcher le seigneur de Rivière de percevoir des droits au préjudice du Comté et, pour donner plus de poids à son action, le Procureur l'avait intentée en appelant au procès le baile des Lautrec, afin que la décision rendue puisse, le cas échéant, être opposée à ce vassal.

Le seigneur Pierre de Ros


La communauté de Vidouze ne termine pas la série de ces seigneurs particuliers avec Archambaud de Rivière, dont, d'ailleurs, on ne trouve plus la trace après le procès dont nous venons de parler. Un nouveau personnage va surgir peu après la donation de 1439 faite à son aïeul Guiraud par le Comte d'Armagnac. Dans la même liasse que celle du procès de 1507, nous avons trouvé en copie un acte rédigé en latin par " Johannes de Sancto Monte, curé clerc, par l'autorité royale du Duc d'Aquitaine", notaire du lieu de Sancto Monte et qui relate à la date du 15 Avril 1473 la prestation du serment de fidélité des habitants de Vidouze à noble seigneur Pierre de Ros, chevalier co-seigneur du dit-lieu ; et ce à la suite d'une restitution de ses droits et prérogatives sur cette communauté opérée à son profit par le Roi Louis XI en sa faveur. Les lettres patentes du souverain français sont datées du parc des Tours le 27 février 1472. Elles expliquent que : "Notre ami et féal Pierre Derros, chevalier, seigneur de Ros Derrode et de Vidose assis en le Comté d'Armagnac" est remis en possessions des dites terres qui lui avaient été enlevées durant les guerres et divisions qui avaient surgi entre les Comte de Foix et d'Armagnac ; le traité de paix signé entre les deux belligérants ayant décidé que toutes les terres et seigneureries prises à l'occasion de cette guerre seraient rendues, le sieur Pierre Derros avait plusieurs fois nommé le Comte d'Armagnac de lui restituer la terre de Vidouze et sur le refus de ce dernier il s'adressait au Roi.Celui-ci considérant que par suite de l'arrêt du Parlement de Paris de 1470, le Comté d'Armagnac avait été placé sous séquestre à son profit devait restituer la dite seigneurie en suppliant. En conséquence, de ces lettres patentes, noble seigneur, Pierre de Ros, se présente le 15 Avril 1473 à Vidouze assisté du Notaire et de diverses notabilités et il y reçut le serment de fidélité de la population assemblée.

Les seigneurs de Rodes ou arodes sont connus dans le pays. Une vielle tradition leur attribue la possession d'un château fort sur le territoire de la section de Vauze, commune de Bassillon, canton de Lembeye. L'emplacement de ce château est encore apparent sur un tertre appelé "Les Moutats". Paul Raymond, ancien archiviste de Basses-Pyrénées, déclare dans son Dictionnaire topographique que la "Senhorie de Rode et Bausée était un fief relevant de la Vicomté de Béarn". Elle avait été créée en 1641 sous la forme d'une baronnie qui comprenait Peyrelongue-Abos et Vauzé. Elle a dû s'éteindre dans la suite, car, en 1760, le terrier de Vauzé ne la mentionne plus. Le territoire de Vauzé est contigu à celui de Vidouze.








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