La monographie de 1887 de Montgaillard
Hautes-Pyrénées
département 65.

(ADHP - Monographie établie en 1887)




00036426
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I


La commune de Montgaillard dépend du canton de Bagnères, même arrondissement.

Elle est située à huit kilomètres environ de cette ville et à treize kilomètres en amont de Tarbes. Elle est bornée à l'est par Orignac et Antist ; au midi par Trébons et Astugue, à l'ouest par Loucrup et au nord par Hiis et Vielle-Adour.

Le territoire qui s'étend sur une distance de six kilomètres de l'est à l'ouest et de vingt-cinq hectomètres du nord au midi, présente un aspect très varié. Deux contreforts des Pyrénées dominent une plaine restreinte baignée par l'Adour et le canal Alaric. Dans le côteau du couchant qui est plus élevé, on remarque à sa superficie une couche de terre argileuse, mêlée de débris de roches et même de grosses pierres géomètriques, ce qui fait supposer que l'Adour a passé à cette altitude dans les premiers âges, ou que ces débris ont été laissés là par quelque déluge.

Plus bas, on trouve un filon de schiste qui semble, par la direction, la suite des carrières schisteuses de Labassère au sud. Au midi du village, le mamelon de la Carde présente la même couche superficielle ; mais, dans le sous-sol, on trouve à l'aspect du nord, une espèce de pierre moulière qui n'a jamais été exploitée.

A l'est du mamelon sort un griffon d'eau minérale froide dans un espèce d'étang appelé la Salière. Des travaux de captage y ont été entrepris vers 1864, mais sans résultats, à cause des difficultés multiples que présente le sol à cet endroit.

Dans la plaine, la couche supérieure est compressée de terre silico-calcaire sur un fond de roche calcaire. Le côteau du levant contient la marne calcaire et moellon propre à bâtir et même à tailler. Au versant oriental, on trouve encore un griffoir d'eau sulfureuse qui a des propriétés siccatives utilisées pour les plaies.

Comme curiosité naturelle, on peut citer le point de vue magnifique du sommet du côteau occidental. Ce point paraît avoir été une station télégraphique par une espèce de retranchement qui se trouve à la partie culminante. De là, la vue s'étend sur une grande partie du département ; elle embrasse , au nord, la vaste plaine de l'Adour jusqu'à Maubourguet, et au sud, l'imposante chaîne des Pyrénées avec ses contreforts.

Le sol, surtout dans la plaine, est très riche et peut rivaliser avec les meilleurs de France. Les petits canaux innombrables dérivés de l'Adour et de l'Alaric arrosent une grande étendue de prairies naturelles, ce qui donne aux habitants le moyen d'élever et d'engraisser beaucoup d'animaux et de se procurer ainsi du fumier en abondance.

Le principal cours d'eau est l'Adour qui traverse le centre du village. Presque parallèlement, au pied du côteau occidental, coule le canal de l'Alaric qui date de l'occupation des Visigoths. Il y a encore un autre canal dit canal des moulins qui vient de Trébons et qui alimente deux moulins après avoir arrosé de nombreuses et fertiles prairies. Dans le côteau de l'est, on voit aussi la source de Prégnaléde d'un débit assez abondant et toujours égal qui coule vers l'Arrêt, ruisseau qui sert de limite entre Montgaillard et Orignac et la source de Lagrave, ruisseau qui va se jeter dans l'Alaric. Au sud-ouest d'Astugue, l'Adouloustre qui vient se jeter dans l'Adour au centre du village, et enfin, au nord du plateau occidental coule un autre petit ruisseau appelé Arrousius qui descend vers l'Adour sur la limite de Hiis. Ces petits ruisseaux ont un petit débit qui ne peut guère être utilisé pour les irrigations à l'exception de l'Adouloustre qui parfois aussi cause des dégâts par des inondations dans les prairies qu'elle arrose.

L'eau qu'on trouve en abondance dans plusieurs plusieurs sources et dans les puits particuliers est généralement potable ; mais il y a surtout deux ou trois fontaines où l'on va puiser uniquement pour le plaisir de boire de cette eau qui est très bienfaisante.

II


La population de Montgaillard, d'après le recensement de 1886 est de 924 habitants. Ce chiffre est inférieur de 130 à celui de 1876. C'est une diminution qui se produit presque régulièrement chaque année, par suite du départ de certains jeunes gens vers les emplois de la ville et aussi la différence des décès et des naissances.

La commune peut se diviser en trois principales sections, savoir :


- le village proprement dit comprenant le quartier de Marque-debat, de Coustète, de Marque-dessus, des Charpentiers et du Cap de la vielle, en tout 640 habitants ;

- la Caussade comprenant aussi le château de Nodrast et les fermes de Lapeyrède, en tout 209 habitants ;

- enfin le hameau des Bourdès comprenant 22 fermes isolées et qui compte 75 habitants, soit au total 234 feux et 217 maisons.


Les seuls employés au service de la commune sont : le secrétaire de la mairie, le valet commun, un garde-champêtre et le cantonnier communal.

Toute la population étant catholique, il n'y a qu'une église à laquelle est attaché un desservant.

La commune relève de la perception de Pouzac dont le siège est Bagnères.

Montgaillard a un bureau de Poste de quatrième classe sans télégraphe. Pour ce dernier service, la commune est desservie par le bureau de Bagnères.

- La contribution financière s'élève à près de 4.900 francs (centime de franc 0,15368).
- Celle des portes et fenêtres....................... à 952 francs.
- la personnelle et mobilière...................... à 1.616 francs (centime : 0,98997).
- celle des patentes..................................... à 758 francs.



Les principaux revenus de la commune consistant dans la vente de deux coupes de bois, l'une de quelques arbres à haute tige et l'autre distribuée en affouage suivant un taux déterminé, le tout pouvant rapporté un total de 1.600 francs. Les carrières de moellons et de marne donnant annuellement un produit variant de 1.000 à 4.000 francs. Chaque année aussi la commune vend au profit de sa caisse des châtaignes, glands et thuyes qui se trouvent dans les bois, ainsi que la boue et fientes des rues. Enfin, il existe une taxe de pacage pour tous les animaux qui vont pacager dans les terrains communaux. Ces divers produits peuvent atteindre la somme de 3 à 4.000 francs en moyenne.

III


Les habitants de Montgaillard tirent leurs principales ressources de la terre. Les champs assez étendus et fertiles se prêtent à toutes sortes de culture. Le blé ou froment occupe annuellement une superficie de 70 hectares environ et rend en moyenne 22 hectolitres par hectare ; le méteil, mélange de froment et de seigle, produit un peu plus et se cultive sur une superficie à peu près égale. Dans les côteaux seulement, on sème quelques parcelles d'avoine et d'orge dont le rendement peut être évalué à 30 hectolitres par hectare ; on peut en dire autant du seigle qui produit un peu moins. La semence nécessaire à l'hectare de ces céréales est en moyenne de 3 hectolitres. Le maïs est la céréales la plus cultivée. Il occupe à peu près les deux tiers de la plaine et rend en moyenne 40 hectolitres à l'hectare. Au contraire, la pomme de terre domine dans les côteaux et donne environ 200 hectolitres.

Les cultivateurs abandonnent en général l'assolement bisannuel ; le blé revenant trop souvent dans la même terrain est envahi par les herbes adventives, sur les terres d'alluvion de la plaine. Aussi on se trouve bien aujourd'hui deux années consécutives du maïs ou des pommes de terre et de ne faire revenir le blé dans le même terrain que la troisième année. Le sol est labouré à billons pour le blé et à plat pour le maïs et la pomme de terre : ce labour se fait généralement avec la charrue en fer simple et à une profondeur de 12 à 15 centimètres. Sur la chaume du blé, on sème le trèfle incarnat qui offre une précieuse ressource pour le pacage de tous les animaux en automne et surtout au printemps. Les prairies naturelles qui, pour la plupart, sont irriguées par les eaux de l'Alaric, de l'Adour et de l'Adouloustre, donnant abondamment du fourrage d'excellente qualité, on peut évaluer le rendement de la première coupe faite en juin juillet à 4.500 kilos de foin par hectare, celui de la seconde coupe à 2.800 kilos de regain. L'herbe qui repousse à l'automne constitue encore un excellent pâturage pour les bestiaux.

La forêt communale est divisée en plusieurs cantons tous soumis au régime forestier, savoir : sur la rive gauche de l'Adour, le bois de la Carde où domine le châtaignier, aménagé en taillis et qu'on exploite en coupes affouagères tous les vingt cinq ans environ. La Passade et Sarrat de peu d'étendue où croissent des futaies magnifiques : essence chêne ; la châtaigneraie longue qui est complantée de châtaigniers en plein rapport. Sur la rive droite de l'Adour, on trouve : la Caussadette exclusivement plantée en futaies de chêne ; Lassèques aménagées en taillis sous futaie exploité comme la Carde en coupes affouagères et composé de chênes, de bouleaux et de cerisiers.

La vigne couvre une partie du côteau soit sur la rive droite, soit sur la rive gauche de l'Adour. Le vin assez abondant est de qualité médiocre, le raisin ne pouvant arriver à parfaite maturité à cause des froids hâtifs de l'automne. Le phylloxéra n'y a pas fait son apparition ; mais le mildiou y a causé déjà des ravages dans les deux dernières années. Quelques propriétaires ont essayé en 1886 le traitement par le sulfate de cuivre, mais les résultats ont été peu satisfaisants. Beaucoup ont réussi à augmenter leur récolte et surtout à l'améliorer par le sucrage de la vendage.

On élève à Montgaillard à peu près toutes les espèces d'animaux de ferme ; mais principalement les vaches, les chevaux et les porcs. Quelques éleveurs ont même acquis une assez grande réputation par les produits de leurs poulinières soignées avec intelligence. Les boeufs de travail sont achetés assez jeunes et après deux ou trois années sont engraissés pour être livrés à la consommation. Les vaches appartiennent aux trois races plus ou moins croisées : lourdaise, auroise et béarnaise. On élève beaucoup de veaux que l'on vend pour la boucherie vers le septième mois. Avec la grande quantité de maïs et de pommes de terre que l'on récolte, il se fait un élevage considérable de cochons que l'on engraisse très bien. Les produits de cette espèce d'animaux donnent les meilleurs résultats grâce aux croisements bien entendus que l'on doit à feu Dulac Martial, de Montgaillard, ancien président de la Société d'Agriculture de Bagnères.

Quelques grands propriétaires, seulement, engraissent des troupeaux de moutons qu'ils achètent à Lourdes et qu'ils vendent quelques semaines après à destination de Pau, de Bordeaux et même de la Provence. Les autres cultivateurs, de moyenne culture, ont un troupeau de brebis et font de l'agneau de lait qu'ils vendent avantageusement comme les moutons et brebis qu'on engraisse ensuite.

Le gibier a à peu près disparu au moins la plus grande partie de l'année. Les sept ou huit chasseurs de la localité doivent se contenter de quelques cailles et parfois de nombreuses palombes et ramiers mais à la condition de veiller soigneusement à leur passage qui est très variable ; les lièvres sont très rares ; on ne voit plus ni perdrix, ni bécasses.

Autrefois l'Adour offrait une excellente ressource pour les pêcheurs ; aujourd'hui, par le chlorure de chaux, on détruit tout. Tous les cours d'eau sont vite dépeuplés, et les amateurs de Tarbes et de Bagnères rapportent assez rarement quelques unes de ces belles truites qui étaient exclusives à l'Adour.

Dans le côteau oriental, on trouve deux carrières à moellon à bâtir, dit pierre de Montgaillard, exploitées à ciel ouvert. L'une fournit de gros blocs utilisés pour l'endiguement de l'Adour ; dans l'autre, on taille certaines planches pour en faire diverses pièces, telles que chambranles, tombes, auges, etc. Près de ces carrières, on exploite également deux carrières de marne calcaire, où viennent puiser les cultivateurs des communes voisines. Sur la rive gauche de l'Adour, il y a aussi une carrière de schiste qui l'on suppose bon à faire l'ardoise, mais que l'on n'exploite guère à cause du mauvais état du chemin et de l'encombrement des déblais.

Sur le canal Alaric, se trouve un moulin à farine avec une batteuse ; et un peu en aval, une scierie dépendant de l'ancien château de Nodrest. Il y a encore trois autres moulins à farine avec une batteuse située sur la rive gauche de l'Adour.

Le territoire de Montgaillard est sillonné de nombreuses routes parmi lesquelles on distingue : une route nationale n°125 de Tarbes à Bagnères qui traverse le centre du village du nord au sud ; une route départementale n°4 de Lourdes à Bagnères qui va rejoindre la route nationale près du lac de la Salir ; une route de grande communication n°28 qui a son origine dans la précédente et qui croise ensuite la route nationale pour se continuer à travers le forêt du levant vers Galan et Boulogne ; une autre route de grande communication n°1 de Tarbes à Bagnères longeant la voie ferrée et parallèle à la route nationale ; enfin un chemin d'intérêt commun n°32 qui prend naissance à la route n°28 et se dirige vers Orignac.

Sur la route de grande communication n°28 se trouve le pont de l'Adour qui joint la Caussade au village proprement dit. Sa construction remonte, croit-on, au Xe ou au XI e siècle. Seulement il a été élargi en 1873 parce qu'il était insuffisant pour la circulation à ce pont important. Il est formé d'une seule arche et fondé sur le roc, ce qui explique que ce soit le seul pont sur l'Adour de Bagnères à Montgaillard qui ait pu résister à la terrible inondation de 1875 (légende plus loin).

Entre l'Adour et le canal Alaric pour la vie ferrée de Tarbes à Bagnères. La petite gare de Montgaillard, quoique peu importante, peut-être considérée commune une des plus agréables sous le rapport de la disposition.

Ainsi par ses moyens faciles de communication, les habitants de Montgaillard sont en rapport quotidien avec Bagnères, chef-lieu de canton et d'arrondissement et même avec Tarbes, chef-lieu de département. Toutes les affaires se traitent les jours de marché soit à Bagnères le samedi, soit à Tarbes le mercredi ou jeudi alternativement. Pour le bétail, seulement, ils se rendent au marché et aux foires de Lourdes.

Point n'est besoin d'un service de voitures publiques.

IV


Il est généralement admis que Montgaillard tient son nom du monticule qui domine à l'ouest et qui est plus élevé que toutes les hauteurs environnantes.

Avant la division de la France en départements, Montgaillard appartenait au district de l'Adour, comme on peut le constater dans les documents postérieurs à 1792 qui sont à la mairie. Mais on ne peut rien savoir de certains sur l'histoire de la commune antérieurement à cette époque. On voit dans les registres (très bien tenus) de la municipalité d'alors que cette commune avait relativement plus d'importance qu'aujourd'hui. On y trouve, par exemple, cet arrêté sur la taxe de la viande :

26 messidor An II


- Considérant que les veaux se vendent à un prix très élevé et que les bouchers ne peuvent débiter leurs viandes au prix qu'il en avait été fixé par arrêté du 3 floréal dernier ;

- Considérant que dans la ville de Bagnères qui nous a toujours servi de règle a été fixé à 18 la livre, et que dans la présente commune qui sont en usage d'acheter des veaux plus finis que dans la commune de Bagnères et que par conséquent la fixation doit être plus forte,

Arrété :


La livre du veau a été fixée jusqu'à nouvel ordre à un franc.



On retrouve parmi les agents municipaux à peu près les nêmes noms de famille qu'aujourd'hui dans le conseil municipal. Deux personnages se sont partagés le pouvoir depuis la convention jusqu'à l'Empire. Ce fut d'abord Vilon Burret qui, interpellé par le fameux Monestier qui réside de Tarbes, aurait répondu :

" Tant que je continuerai à remplir mon devoir, je n'ai peur à qui que ce soit ".

Crabère Gervais , qui lui disputa ensuite la maison, s'est rendu célèbre à la fois par son administration et dans l'exercice de la médecine. Il traitait spécialement les épileptiques, et l'on accourait de loin pour lui demander la guérison de cette triste maladie. Vers la fin de sa vie, il se retira dans un couvent de Trappistes où il mourrut enportant le secret de son traitement.

Voici pour le compte-rendu d'une de ses proclamations à propos d'une paix imposé par Bonaparte (Lunéville) :

3 Ventôse An Neuf


Le maire s'est porté chez le ministre du culte et l'a invité à se rendre à l'église pour chanter le Te Deum. De là le premier s'est rendu à la maison commune suivi des citoyens de tous les âges, depuis la caduiché juqu'à la plus tendre enfance, pendant que les femmes accouraient en foule vers l'église, les mères tenant leurs nourissons dans les bras pour rendre témoins d'un grand évènement. Le citoyen Cazaux ministre du culte, a voulu faire parti du cortège civique et s'est rendu à la maison commune, d'où sont partis le maire et l'adjoint en costume précédé d'un tambour, et suivis des membres du conseil municipal et de tous les citoyens. Étant à l'église le maire est monté à la tribune et a dit :



" Citoyens,

C'est avec la plus vive satisfaction que je monte sur cette tribune pour vous annoncer la nouvelle la plus agréable qu'on puisse vous donner. C'est la nouvelle de la paix que nous avons tant désirée ; déjà depuis une heure elle est publiée au chef-lieu de l'arrondissement d'où je viens. Je me suis hâté de venir vous la communiquer, bien persuadé que vous partagerez avec moi la joie qu'elle m'inspire, et votre empressement m'en donne l'assurance flatteuse. J'ai invité le ministre du culte à se joindre à nous pour rendre ensemble nos actions de grâces au Dieu des armées. C'est de qu'il va faire en chantant le Te Deum après qu'on vous aura chanté un couplet analogue à ce grand évènement que j'ai composé en courant ".

Le maire descendit, dit au citoyen Colomès, instituteur primaire, de monter à la tribune où il a chanté le couplet suivant, sur l'air chéri de la marseillaise :




" Enfin la paix est assurée.
Bonaparte l'avait promis.
Il comble notre destinée.
Les rois deviennent nos amis...(bis)
Vaillant guerrier, grand politique,
Il faut encore un de tes coups
Que l'Anglais tombe à tes genoux ;
Qu'il implore la République !
Le Français généreux oubliera ses forfaits
Tout en chantant...(bis)
Vive, vive la paix ! "


Le Te Deum a été chanté avec cet élan et cette exaltation qu'imprimait dans tous les coeurs une nouvelle aussi agréable. De suite après, le maire est remonté à la tribune et a dit :

" Citoyens,

Si le jour n'était aussi avancé, je vous aurais invités pour boire ensemble à la santé de Bonaparte, mais nous renverrons dette petite fête fraternelle jusqu'au moment où les autorités supérieures auront ordonné la célébration solennelle, ce jour n'étant que le prélude d'un jour plus éclatant et cette cérémonie ne devrait être regardée que comme le premier élan de notre messe patriotique... ".



A cette époque, au moins, la population paraissant avoir pris à coeur les principes de la Révolution, excitée, sans doute, par les agents municipaux. Témoin la relation suivante que l'on trouve aussi dans les registres :

" Je soussigné, agent municipal de la commune de Montgaillard, certifie que la publication de l'arrêté du département relatif à l'anniversaire du dernier roi des Français, a été faite avec solennité en présence des habitants de cette commune qui ont été convoqués à cet effet, qui ont promis un sincère attachement à la République et une haine éternelle à la Royauté.

A Montgaillard, ce 11 e pluviose 4 e année République
Vilon Burret, ag. m. secrétaire greffier
".


Et plus loin :

" Du 25 messidor (An 8) - Aujourd'hui, vingt-cinq messidor, la fête du 14 juillet a été célébrée avec solennité ; elle fut annoncée par le son des cloches à la volée. "




La tradition veut que le village fût autrefois tout entier sur la rive droite de l'Adour au quartier de la Caussade. C'est là, en effet, que se trouvait la chapelle de Saint Sernin dont on montrait encore les derniers débris des murs au milieu d'un champ. Pendant la Révolution, aussi, il est fait mention dans les registres de la municipalité d'une émeute provoquée par les femmes qui voulaient forcer la maire à leur remettre les clefs de Saint Sernin pour y faire célébrer une messe par le curé Cazaux.

Plus tard, quelques maisons furent construites sur la rive gauche de l'Adour aux alentours du château qui se trouvait sur un rocher ou s'élève actuellement l'église paroissiale ; et bientôt le chef-lieu fut ainsi transporté dans ce quartier tel qu'il existe aujourd'hui.

Du château très ancien, il ne reste aucun vestige. C'est un autre Vilon Burret, maire en 1848, qui a fait démollir la tourelle qui servait encore de clocher, pour y édifier la nouvelle église. Celle-ci par son emplacement et des proportions est un des plus beaux monuments du genre, et les alentours forment un des sites les plus agréables de le région.

Sur le bord de l'Alaric, à un kilomètre environ du centre du village, s'élève le château de Nodres qui n'offre rien de curieux comme monument. Il appartenait, avant 1789 à un seigneur qui habitait Mascaras. Aujourd'hui, c'est la propriété de Madame Raimbeaun, fille de Mocquart, ancien secrétaire de Napoléon III.

Voici le compte-rendu de la séance de la municipalité qui se trouve bien conservé dans les archives, et relative à la plantation de l'arbre de la liberté.

" L'an mil sept cent quatre-vingt-douze, quatrième de la liberté, et le vingt-neuf juillet dans la maison commune du lieu de Montgaillard, endroit ordinaire des sessions de la municipalité au district de l'Adour et département des Hautes-Pyrénées, où le Conseil Général de la commune est assemblé, auquel le citoyen Joseph Tisnez, maire, a exposé que l'arbre de la liberté signe sensible de la rédemption des peuples et du nôtre, est désiré par les citoyens en général qui ont manifesté d'une manière expresse mais verbale leur voeu. Il convient tant par cette considération que mille autres toutes intéressantes de le planter et de fixer le jour et la manière de cette cérémonie civique. En élevant, de plus en plus, le civisme ardant des citoyens pour la défense de cette liberté chérie, il les portera à l'union et à l'accord si nécessaire pour vaincre nos ennemis qui voudraient encore nous la ravir de nouveau. Ils se pénètreront aussi à la vue de ce signe de l'attachement, du respect et de la soumission qu'ils doivent à la constitution, aux lois nouvelles dans leur exécution pour ne jamais rien faire de contraire, mais bien de se conformer scrupuleusement à tout ce qu'elles prescrivent. Sur quoi, le Conseil Général, ouï le procureur de la commune délibéré unanimement que pour seconder son voeu et celui de tous les citoyens, l'arbre de la liberté sera planté ce soir après les vèpres le long de la grande route et sur la place du Gerbut ; que cet arbre sera orné des couleurs nationales, surmonté de la pique et du bonnet de la liberté ; il y sera placé vers le milieu deux fourches d'ordonnance dont est armée la Garde Nationale ; que cette cérémonie accompagnée des solennités qu'elle demande ; délibère encore qu'en signe de joie publique et en vue de ranimer et de cimenter l'union des citoyens, il sera donné auprès des citoyens une collation en pain et en vin, pour laquelle on vote la somme de soixante livres ou environ, et pour le prix du bonnet, de la liberté en fer blanc, le drapeau tricolore et autres objets nécessaires la somme de trente-deux livres, lesquelles sommes seront payées par le trésorier...etc . "



Les habitants de Montgaillard ont encore des moeurs assez simples puisqu'il y ait une tendance chez la jeunesse à prendre pour exemple les habitudes de la ville, sous le rapport de l'habillement et de l'alimentation. Mais généralement on entretient le ménage avec le pain fait dans la famille (surtout avec du méteil), et la viande de porc salé additionné de quelques canards, oies et dindons. On porte beaucoup les habits tissés pour les métiers à bras de la localité, avec le fil de lin ou de laine confectionné dans les veillées de famille.

Enseignement


En 1792, le sieur Bruno Cazaux était instituteur primaire à Montgaillard en même temps que secrétaire-greffier. Mais obligé de choisir entre les deux fonctions devenues incompatibles, il conserva la titre de secrétaire.

Voici la nomination de son successeur, Vergez :

" Le vingt-six prairial, l'an six de la République Française, une et indivisible, a été convenu et arrêté entre les citoyens Barthélemy Vilon, agent municipal de la commune de Montgaillard, agissant au nom de tous les habitants qui lui ont donné en pleine assemblée de communs pouvoirs spécial et général de traiter avec le citoyen Jacques Vergez our le service d'une année pour l'instruction de la jeunesse de ladite commune et de faire tous les arrangements tant généraux que particuliers pour le salaire dudit instituteur. Muni de ce pouvoir il a proposé au dit Vergez, instituteur, la rétribution ainsi qui suit : premièrement, il sera payé annuellement au dit Vergez, instituteur, des deniers communaux la somme de cent vingt livres en quatre payements égaux en numéraire métallique ; secondement, il lui sera délivré à la forêt deux chars de bois annuellement. Indépendamment de cette rétribution commune, chaque enfant allant à son école lui payera la rétribution suivante, savoir les enfants lisant et écrivant une mesure et demie carrou (méteil) et une mesure milhoc (maïs) pour l'abonnement de l'année et pour les enfants qui ne font que lire, il lui sera payé une mesure carrou et un coupeau milhoc (demi-mesure). Sur quoi le dit Vergez a convenu et s'oblige de faire l'éducation des enfants de la commune avec tout le zèle qui dépendra de lui et de leur enseigner les principes de la bonne morale, de la lecture, écriture et calcul, de leur inspirer les vertus civiques et l'amour de la patrie.

Ainsi convenu et arrêté, nous soussignés, lequel accord a été consigné sur le registre de la commune ,e jour et an que dessus.

Signé : Vilon Burret, ag. m. - Vergez. "


M. Vergez fut remplacé par le sieur Colomès de Pouzac, en prairial An 9, aux mêmes conditions de traitement et avec obligation également d'enseigner la lecture, l'écriture, le calcul et la morale pure.

On trouve encore une seconde nomination du sieur Vergez avec certaines modifications : la voici.

" Ce jourd'hui, vingt-sept décembre mil huit cent huit, le Conseil Municipal convoqué à l'effet de délibérer sur les moyens à prendre pour pourvoir à l'éducation des enfants de la commune se trouvant sans instituteur.

Présents, les sieurs Vilon Burret, maire, Joseph Dutrey, Cazux, Mailhou, Dulac, Vilon, Bilou, Labat, Dalléa, Fourcade. . "



Le maire a pris la parole et a dit que le plus grand intérêt de la commune est de procurer un instituteur pour l'éducation des enfants.

Le Conseil Municipal adoptant la proposition de M. le Maire, arrête que M. Vergez de la commune d'Adé se trouvant aujourd'hui dans notre commune, et sa morale et sa capacité connues depuis longtemps sera invité tout de suite à se rendre dans notre séance pour savoir s'il lui conviendrait de reprendre la place d'instituteur dans la présente commune.

Le Maire a délégué un des membres du Conseil pour en prévenir le sieur Vergez.

A l'instant, le sieur s'est rendu auprès de nous et a accepté la place dans les conditions suivantes :

" Ledit Vergez sera obligé de faire la classe depuis Pâques jusqu'à la Toussaint à six heures précises au matin jusqu'à neuf heures. Et depuis la Toussaint jusqu'à Pâques depuis huit heures jusqu'à onze heures pour celle du matin. Et pour la seconde classe à midi jusqu'à trois heures du soir tout le cours de l'année. Il demeure aussi expliqué qu'il sera chargé du chant d'église. . "



Son traitement communal était de cent cinquante livres et deux chars de bois. La rétribution scolaire était fixée à 8 francs pour chaque élève qui écrivait et à 4 francs pour les autres.

M. Duclos remplaça M. Vergez à peu près aux mêmes conditions et on voit se succéder ensuite ; Pène qui travaillait en même temps à un métier de tisserand et était secrétaire de la mairie ; Cami qui resta peu de temps et fut remplaçé par M. Barrou en 1821. Celui-ci est resté à Montgaillard jusqu'à sa mort arrivée en 1875 ; mais il avait pris sa retraite en 1866 et avait été remplacé par son fils que se trouve actuellement à Loucrup.

M. Bouriot vint le remplacer à Montgaillard en 1881, mais il quitta le département quatre mois après. Votre serviteur soussigné fut appeler à le remplacer et s'y trouve encore espérant faire quelque bien à la population qui lui témoigne ses sympathies.

M. Barrou, père, a donc formé à son école la plus grande partie des hommes qui existent aujourd'hui. Seulement, comme il n'avait d'adjoint que sur la fin de sa carrière, il ne pouvait obtenir tous les résultats qui méritaient ses efforts.

Il va s'en dire que la maison d'école laissait beaucoup à désirer jusqu'en 1864, époque où l'on a construit la maison commune actuelle. C'est un édifice qui sert à la fois de mairie, d'école pour les garçons, d'école pour les filles et de logement pour les maître titulaires. Elle est construite dans un vaste emplacement sur le côteau occidental et à l'exposition du levant. L'école des garçons se trouve au rez-de-chaussée et celle des filles au premier étage. Une cour pour les récréations et un jardin pour l'instituteur sont les seules dépendances de la maison commune.

Le mobilier de l'école des garçons est encore incomplet notamment les tables sont très incommodes. Le conseil municipal ajourne.

Chaque année, les améliorations réclamées, prétextant le défaut de ressources suffisants, et voulant en même temps faire construire un péau couvert.

Les parents comprennent généralement l'utilité de l'instruction : aussi les enfants fréquentent l'école la plus grande partie de l'année. C'est seulement au mois de mai pour la semaille du maïs au mois d'octobre pour différentes récoltes que les enfants sont occupés dans leurs familles.

Au dessous de quarante ans, il est rare de rencontrer un homme, même une femme, qui ne sache lire et écrire. Tous les conscrits de la classe savent signer, et pour les conjoints de 1886, deux seulement, d'origine étrangère, n'ont pas signé leur acte de mariage.

Une bibliothèque publique a été fondée à l'école des garçons par le conseil municipal en 1880. Elle renferme 117 volumes (mais une nouvelle commande vient d'être faite par le conseil pour une somme de 50 francs). Le nombre de prêts s'élève en moyenne à 160 par an).

Les enfants appartenant tous à la classe des cultivateurs ou des ouvriers n'ont que très rarement quelques sous dont ils se servent même pour leurs objets classiques. Aussi il est impossible de faire prospérer une caisse d'épargne scolaire. Le conseil a également ajourné la fondation de la caisse des écoles.

L'instituteur public

Montgaillard, le 12 Avril 1887

A. Bèlin.




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département 65.
© Marie-Pierre MANET









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