La monographie de 1887 de Pouzac
Hautes-Pyrénées
département 65.

(ADHP - Monographie établie en 1887)




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I


Pouzac se trouve dans une situation charmante, sur les bords de l'Adour au pied même des Pyrénées, à 16 kilomètres sud de Tarbes et à 2 kilomètres nord de Bagnères, son Chef-lieu d'arrondissement.

La commune est limitée par les territoires de Trébons, d'Ordizan, de Hauban, de Labassère et de Bagnères.

Son étendue est de 5 kilomètres du nord-est au sud-ouest et de 2 kilomètres du sud-est au nord-ouest et sa superficie totale de 757 ha 44 a 42.

La partie qui se trouve dans la pleine est située sur la rive gauche d'une vallée d'environ deux kilomètres de largeur, sillonnée par l'Adour et bordée à l'est et à l'ouest par des collines où la grâce des formes le dispute à la richesse du sol. Le tiers de la superficie se trouve dans la plaine et le reste sur les hauteurs.

Le thalweg de la vallée est recouvert d'un amas épais, composé d'un humus assez abondant, entremêlé de roches roulées dont les dimensions s'étendent depuis celle du sable le plus fin jusqu'à celle des blocs arrondis de plus de un mètre de diamètre : débris des monts qui constituent le fonds et les flancs des vallées supérieures. Ces débris ont été apportés par les anciens glaciers qui s'étendaient depuis ces vallées jusqu'à Hiis dans la plaine de Tarbes.

La surface de ces amas morainiques a été remaniée par des alluvions subséquentes et sillonnée par les cours d'eau descendus par la rive gauche des monts du Bédat et de César, et par la rive droite des collines de la Serre (hauteurs qui limitent ladite vallée) ruisseaux ou gaves dont les eaux vont grossir l'Adour.

Quand on fouille au-dessous de ce sol de transport jusqu'à une profondeur d'environ un mètre et demi, on peut recueillir des galets striés qui attestent leur origine morainique. De grands blocs erratiques, de quarzite, épars sur différents points, viennent ajouter un incontestable témoignage à la réalité de ces phénomènes de l'époque glaciaire.

Le Camp de César, hauteur qui domine le village à l'ouest, a sa face méridionale, schisteuse et sa partie orientale, granitique ; ces granits qui passent tantôt au gneiss, tantôt à la pegmatite se prolongent jusqu'à Montgaillard et présentent des noyaux de kaolin et de mica palmé dont les couches vont se perdre sous les alluvions de la plaine de Tarbes.

En face du Camp de César, sur la rive droite de l'Adour s'élèvent les collines de la Serre qui offrent aux géologues, un vaste champ d'études pour l'apparition de l'ophite. On sait que l'ophite est une roche à base d'amphibole et de feldspath, passant souvent à la diorite et se chargeant souvent aussi de cristaux d'épidote. La plupart des géologues considèrent cette roche comme ayant eu une origine ignée et ayant surgi à une époque relativement récente, puisqu'elle a soulevé les couches crétacées et même celles qui appartiennent au tertiaire inférieur. A part les modifications statiques que l'apparition de l'ophite a apporté dans la position originelle des couches sédimentaires, on observe que ces couches ambiantes ont subi par le contact de la roche ignée ou par l'influence des vapeurs et des gaz qui l'ont accompagné des modifications très prononcées dans leur constitution moléculaire et dans leur composition chimique ; ces phénomènes sont désignés sous le nom de métamorphisme.

On remarque des masses calcaires fortement altérées passant tantôt à l'état de marbre saccharroïde, tantôt à celui de cargnieules spongieuses et renfermant les minéraux les plus variés : quartz primatique, nectique, couzeranite, dipyre, feldspath, albite, spath calcaire, aragonite, fer oligiste, fer sulfuré, fluorine, tale, stéatite, etc.

A l'apparition des ophites se rattache, dans notre région, un phénomène dont les résultats ont eu une immense influence sur la prospérité du pays ; je veux parler de la présence des eaux minérales à Bagnères-de-Bigorre.

Si les hauteurs qui encaissent, à l'ouest et à l'est, la belle vallée de Pouzac, sont remarquables par leurs richesses naturelles, elles forment encore de belles promenades trop peu fréquentées pendant la belle saison par les touristes et baigneurs de Bagnères.

On ne peut s'empêcher d'admirer la position heureuse du Camp de César, cette touffe d'arbres qui le couronnent, cette maison rustique dont les murs se découvrent dans l'intervalle du feuillage, et dont la blancheur se marie si bien avec les beaux tapis de verdure qui l'entourent, ces côteaux qui le dominent au couchant et d'où l'oeil doit embrasser un immense horizon ; tout enfin, jusqu'au nom dont il a droit de s'enorgueillir semble devoir attirer les étrangers en foule sur le sommet de ce monticule. Trop peu cependant le visitent, parce que jugeant à la simple vue cette course trop pénible et trop longue, ils redoutent de l'entreprendre à pied ou n'osent aller à cheval sur ces hauteurs.

Détrompons ces voyageurs timides que la crainte d'un peu de fatigue fait reculer devant tout le plaisir que promet un aussi beau paysage. On peut entreprendre cette promenade même sur un léger wiski, et parvenir ainsi jusqu'à la crête du mont qui est à 400 mètres au-dessus du village. Mais comme la plupart de celles qu'on fait dans les pays de montagne, elle présente plus d'agrément à pied, parce qu'on peut, à tout instant, s'arrêter sans embarras, courir après un papillon, cueillir quelque jolie fleur ou contempler, toujours avec un nouveau plaisir le tableau qui se déroule sous les yeux à mesure que l'on s'élève.

Pour atteindre à la hauteur du Camp, se présentent deux chemins également faciles ; mais comme ils serpentent dans des directions contraires, l'un à l'est, l'autre au sud, on peut suivre le premier en montant, et le second à la descente, afin de jouir des différents aspects qu'ils offrent tous les deux. Impossible de se faire une idée de la richesse et de la beauté des tableaux que l'on découvre de toutes parts, dès que l'on est arrivé sur le sommet du mont. On reste muet d'extase, et l'on manque de mots pour exprimer le sentiment d'admiration que l'on éprouve. Cependant la vue a bien vite épuisé le peu de force qu'elle a pour embrasser de si vastes objets, l'esprit se reporte alors sur les souvenirs qui se rattachent à ces lieux. Ils lui rappellent la fortune du plus grand capitaine des temps anciens, et au nom de César dont les légions auraient campé sur ces hauteurs, lui fait avidement rechercher les vestiges de fortifications qu'elles y auraient établies et que le temps pourrait avoir respectées ; mais tout a disparu ; et, à l'exception de quelques épaulements dont on retrouve encore les traces dans la partie nord, la plus accessible à l'ennemi, il n'y reste plus que le souvenir d'un grand homme.

C'est là que fut trouvée enfouie dans la terre l'inscription romaine Marti invicto. Cet ex-voto offert à Mars, Dieu des combats, par G. Minicius, prouve que ce monticule aurait servi de campement ou que sur ce point se serait livrée quelque bataille. La disposition du terrain rendrait peut-être cette dernière opinion plus probable ; car dans quel autre objet aurait-on élevé ces épaulements et d'où seraient sortis ces ossements et ce tronçon d'épée découverts au commencement du siècle en creusant les fondations ?

Mais si ce lieu fut témoin de combats, César s'y trouva-t-il en personne, et serait-ce à cause de sa présence qu'il aurait reçu et conservé ce nom ?

Cette opinion a toujours trouvé beaucoup d'incrédules ; plusieurs même ont porté cette incrédulité jusqu'à douter que César eût jamais pénétré dans cette partie des Gaules, et ils ont pensé que ce mont n'avait été nommé ainsi que parce qu'il avait servi de campement à ses soldats.

En effet, au milieu des obscurités de l'histoire de cette contrée, il est permis d'avoir, sur ce point, bien des doutes : mais ce qui toutefois semblerait donner plus de vraisemblance à l'opinion contraire, c'est que César dans sa huitième campagne, après qu'il eût été maintenu dans le gouvernement des Gaules, se rendit lui-même dans l'Aquitaine pour recevoir la soumission des peuples vaincus. Pourquoi ne pourrait-on pas croire alors qu'il vînt dans les hautes vallées de ces montagnes, quand on voit surtout que son nom est demeuré dans divers endroits comme un souvenir de son passage. Outre ce camp, ne trouve-t-on pas non loin de Tarbes, un bourg appelé Juillan du nom de Julianus (Jules), et dans le sein de la chaîne des Pyrénées, à Cauterets, un bain de construction toute romaine, conservant encore le nom de Bain de César ?

Des hauteurs qui dominent le camp, du côté de l'ouest, on découvre à sa droite les vallons de Trébons et d'Astugue, remarquables par la verdure de leurs prairies, par leurs gracieuses ondulations, par les ruisseaux limpides qui les arrosent et surtout par leurs habitations presque coquettes, cachées en partie par une touffe de beau feuillage ; à sa gauche le vallon de la Serre-Carré, territoire de Pouzac que semblent habiter l'innocence et le bonheur.

Avant que M. de Cassan eût construit cette habitation charmante, habitée aujourd'hui par la célèbre famille bretonne de l'Angle, beau manoir qu'on voit sur l'un des points culminants de la Serre-Devant, qui font face au Camp de César, on ne rencontrait guère d'étrangers sur ces hauteurs. Elles n'étaient visitées que par quelques habitants de Bagnères qui s'y rendaient en partie de plaisir, comme à l'une des promenades dont la position était la plus remarquable aux environs de leur ville. On commence à les fréquenter aujourd'hui, et elles le méritent bien.

Là, la vue n'a rien à désirer ; elle ne peut même suffire à l'étendue du pays qui se déploie de toutes parts. C'est un damier enrichi de mille couleurs, dont un grand nombre de villages disséminés sur une plaine immense, forment les différentes places qui en garnissent les cases. Impossible de donner une idée de la beauté de ce tableau. A ses pieds, Pouzac et sa petite vallée, avec les molles inflexions de l'Adour qui arrose des champs fertiles et des prairies verdoyantes ; au sud c'est Bagnères dont l'aspect brillant présage bien l'image des plaisirs qu'on y goûte ; c'est l'heureuse vallée de Campan et les montagnes qui la couronnent ; au nord, c'est la grande plaine avec le vaste horizon.

" J'ai visité Paris et ses merveilles !
J'ai parcouru les palais de nos rois !
Ô mes amis, à des splendeurs pareilles,
Jamais mon coeur ne s'émut une fois.
Le souvenir de nos chères montagnes,
Seul me charmait sous ces riches lambris !
Bords de l'Adour, tes riantes campagnes
Valent tout l'or que l'on montre à Paris ! "


Si toutes les communes des Pyrénées semblent favorisées par leur beau ciel, l'air salubre et pur qu'on y respire, les beaux paysages d'où l'oeil ravi ne voudrait jamais s'éloigner ; Pouzac a de jolies que beaucoup d'entre elles une situation des plus heureuses. Par sa vallée, elle participe à la fertilité proverbiale des plaines de l'Adour, par ses hauteurs elle jouit de tous les avantages du pays des montagnes, et enfin par sa proximité de la jolie ville de Bagnères, à laquelle elle est déjà rattachée par de nombreuses villas, elle possède les avantages de la ville sans en connaître les inconvénients. Pouzac est bien bâti ; des ruisseaux d'eau limpide accourent de toutes les places et de toutes les rues ; ils se croisent, s'enfoncent sous terre, reparaissent ; tout est rempli de leurs murmures, de leur fraîcheur et de leur gaîté. Des fontaines sont installées dans tous les quartiers et fournissent abondamment, à la population toute entière, une eau fraîche et éminemment potable. Une canalisation pratiquée sous les rues, permet aux habitants de prendre des concessions d'eau, moyennant une rétribution annuelle de 6 francs par robinet.

Les ruisseaux vifs et limpides, tributaires de l'Adour, arrosent tout le territoire de Pouzac. Leurs eaux abondantes sont presque toujours couvertes d'un dôme épais de verdure, conservant ainsi leur fraîcheur dans tout leur parcours. On les voit à travers le feuillage briller, sautiller et bondir, heureux et fiers de régner sur cette belle campagne.

Élevé d'environ 540 mètres au-dessus de la mer, entouré à l'exception du nord, comme je l'ai déjà dit, par des collines assez élevées, Pouzac ne peut avoir qu'une température agréable. En effet, l'été ne nous apporte point de chaleurs excessives. C'est au contraire un véritable printemps. Dans cette saison, on ne voit point les feuilles jaunir, l'herbe se dessécher. Des fleurs, sans cesse renaissantes, ornent les prairies entrecoupées par les ruisseaux limpides qui, descendant de la montagne, répandent dans l'atmosphère une douce fraîcheur si favorable à la santé !

L'automne s'y prolonge fort tard, et ce n'est que vers la fin de décembre qu'apparaît l'hiver. Il est ordinairement pluvieux ainsi que la plus grande partie du printemps. La plus belle saison commence vers la fin de mai et se continue très avant dans l'année. Le mois de juin présente des changements assez brusques dans la température et dans la direction des vents. Juillet se présente avec une température plus constante, un ciel plus pur ; et, à l'exception de quelques orages, ce mois est le plus beau de l'année ; les vents du sud-ouest et du nord-est qui règnent alors entretiennent une chaleur moyenne de 18° à 20°. Le mois d'août est le plus chaud, néanmoins le thermomètre marque rarement les 27 degrés.

Les pluies assez fréquentes annoncent, au mois de septembre, que le soleil s'éloigne de nos climats ; les vents de sud-ouest et de nord-ouest commencent alors à dominer. Cependant, les beaux jours ne sont pas rares.

L'air exempt d'émanations malfaisantes, offre toujours une pureté remarquable. Le ciel est souvent d'un bleu azur qui réjouit la vue.

Il est facile de conclure qu'une température aussi douce, aussi modérée, doit être salubre. L'air est si pur qu'il n'y a jamais eu à signaler de maladies endémiques. Aussi notre climat est-il connu comme un des plus favorables à la longévité que nous offre la France.

II


Désignation en rues, quartiers, hameaux :

Le village..... 152 maisons ; 197 ménages ; 709 individus.
Les hameaux.... 37 maisons ; 37 ménages ; 201 individus.
Population absente au moment du recrutement ....... 31 individus.

Le remembrement antérieur avait donné :

En 1846..... 1008 habitants.
En 1851....... 980 habitants.
En 1856....... 921 habitants.
En 1861....... 962 habitants.
En 1866....... 980 habitants.
En 1872..... 1020 habitants.
En 1876..... 1003 habitants.
En 1881....... 976 habitants.


On voit donc d'après le tableau ci-contre que le chiffre du dernier recensement est au-dessous de la moyenne annuelle des 9 périodes.

Peut-on dire d'après cela que la population de Pouzac tend à diminuer ? Je ne le pense pas, et en examinant le dit tableau on remarque trois fluctuations dans le mouvement de la population : diminution de 83 h. de 1846 en 1856 ; augmentation de 95 h. de 1856 en 1872 et enfin diminution de 75 h. de cette dernière année en 1886. Je crois que la population restera longtemps encore sensiblement la même, c'est-&agrae;-dire qu'elle ne saurait dépasser le maximum de 1020 de l'année 1872, ni descendre au-dessous du chiffre minimum 928 qu'elle a atteint en 1856.

L'organisation municipale est réglée par la loi du 23 avril 1884. Comme comptant plus de 900 et moins de 1500, Pouzac nomme 12 conseillers choisis malheureusement, non parmi les plus intelligents des habitants, mais bien par suite d'une tradition regrettable, parmi les plus riches et les plus influents ; ils sont en général ennemis du progrès et par suite du gouvernement actuel.

Les seuls fonctionnaires municipaux sont : 1 garde-champêtre auquel on donne 400 francs ; 1 valet commun, 380 francs, et un secrétaire qui reçoit le modique salaire de 200 francs. Il serait à désirer que, dans les grandes communes, l'instituteur ne fût plus autorisé à être secrétaire. C'est une charge humiliante dont il ne pourra se soustraire que lorsque le gouvernement aura notablement amélioré son avenir matériel en augmentant son traitement actuel.

La mairie se trouve au milieu du groupe scolaire, dans le même corps de bâtiment, au premier étage, entre le logement de l'instituteur et celui de l'institutrice. Elle se compose d'une grande salle mesurant 8 m 20 sur 6 et éclairée par quatre fenêtres donnant : 2 sur le nord et 2 sur le sud, ; et d'un petit cabinet où se trouve une partie des archives et auquel donne accès un escalier que l'on prend à la porte principale de l'établissement, dans la cour des garçons. Il aurait mieux valu donner à la mairie une entrée distincte ou mieux, la détacher tout à fait du groupe scolaire.

Un desservant se trouve à la tête du culte catholique, le seul en usage dans la commune. Ce fonctionnaire a, comme partout ailleurs, un trop grand prestige et reste redouté de la majorité de la population qui est ignorante et fanatisée.

Les habitants gagneraient à l'union cordiale du curé et de l'instituteur, à ce que ceux-ci marchassent comme les apôtres du progrès, la main dans la main, c'est ainsi que les divisions locales s'effaceraient et que les lumières se répandraient dans les masses ; malheureusement cette entente est loin de se réaliser ; l'antagonisme entre les deux fonctionnaires restera menaçante (sic) tant que l'un sera l'ami de l'ignorance, et l'autre, du progrès.

Le presbytère est une construction assez importante, avec cour et parterre devant, et vivier et vaste jardin derrière. M. le desservant doit passer agréablement ses longues récréations dans un si confortable logement.

Quoique Pouzac soit le centre de la perception du même nom, le receveur municipal a établi son domicile à Bagnères, ce qui n'offre pas d'inconvénient attendu qu'il vient tous les mois recouvrer les impôts des contribuables.

Pouzac ne possède aucun bureau de poste. La commune est desservie par Bagnères à 7 h du matin pendant l'été et à 8 h pendant l'hiver.

Il serait à désirer pour le bien de tous que l'administration fît faire une deuxième levée, à midi, par le facteur qui repasse à Pouzac, à cette heure pour rentrer à son bureau de poste à Bagnères ; les lettres n'auraient pas ainsi ce retard forcé de 24 h qui nuit considérablement aux relations commerciales ou autres.

Le budget primitif de l'exercice 1887 a été établi comme suit :

Recettes.................. 11.818 f 18
Dépenses................. 11.324 f 54
Excédent de recettes...... 493 f 64

Le budget additionnel est en général très important et ce n'est pas rare d'y trouver une vingtaine d'articles faisant une somme de 5.000 f en moyenne. On commence à faire disparaître beaucoup d'articles pour les porter au budget primitifs ; en procédant ainsi on viendra, en quelques années, à faire disparaître le budget additionnel ce qui ne nuira pas à la comptabilité du receveur.

La valeur du centime est de 170.

Le principal des quatre contributions directes donne :

Foncière .......................4.555 f 12
Personnelle-Mobilière.... 1.321 f 49
Portes et fenêtres.......... 1.090 f 58
Patentes.......................... 597 f 70
_______________________________
Total........................... 7.565 f 19

III


Le terrain à Pouzac est généralement fertile et pourrait produire en plus grande quantité si les procédés d'agriculture étaient plus intelligents. Malheureusement la routine règne en maîtresse ici comme un peu partout dans le département : les paysans d'aujourd'hui font ce qu'ils ont toujours vu faire ; les conseils qu'on leur donne sont écoutés avec méfiance, croyant leur manière de faire supérieure à tout ce qu'on écrit sur les livres d'agriculture ou recommande dans les conférences agricoles qui sont hélas trop rares et trop peu suivies.

L'instituteur, dit-on peut faire beaucoup sous ce rapport ! Pas autant qu'on aime à le dire : il ne peut tout au plus que faire aimer l'agriculture, mais il est impuissant à lutter contre les anciens procédés. Que peut faire, en effet, un enfant du cours supérieur qui sort de l'école primaire pour prendre part aux travaux agricoles ? Saura-t-il appliquer avec intelligence les procédés qu'on lui a vantés en classe ? Aura-t-on assez de confiance en lui pour lui donner la direction de la ferme ? ou du moins pour lui laisser faire des innovations parfois coûteuses ? J'en doute. Il a des connaissances théoriques assez étendues, j'en conviens, mais pas assez de pratique, pas assez d'autorité pour obtenir des résultats satisfaisants. Voici ce qui arrive en général, les saines leçons de l'école s'effacent et peu à peu l'enfant devient routinier comme ses parents.

Ainsi les leçons de l'instituteur, données à des enfants trop jeunes, ne donnent presque pas de résultats. Si le gouvernement veut relever l'agriculture, il devra créer à côté de l'école primaire, des écoles spéciales où les jeunes paysans pourront perfectionner leurs connaissances agricoles par une pratique intelligente savamment dirigée.

Sous le rapport agricole, Pouzac peut se diviser en deux zones, celle de la plaine et celle de la montagne.

La 1 ère produit surtout du blé et du maïs.
La 2 e du méteil, du seigle et des pommes de terre.

1 - Plaine :
Production par hectare en blé 25 hectolitres.
" " " " " " " " " " " " " " en maïs 35 ".

2 - Montagne :
Production moyenne par hectare en seigle 16 "
" " " " " " " " " " " " " " " " " " " " en méteil 14 "
" " " " " " " " " " " " " " " " " " " " en pomme de terre 250 ".

Ce rendement moyen serait facilement dépassé si les engrais étaient plus soignés, les instruments aratoires plus perfectionnés et les assolements mieux répartis.

Il est à noter que presque tout le territoire appartient à quelques riches particuliers, rentiers pour la plupart, qui, au moment des élections font voter leurs fermiers comme ils l'entendent.

Les prairies artificielles sont très rares ; les naturelles produisent beaucoup d'herbe, excellente sur la colline, mais en petite quantité ; en grande quantité dans la plaine, mais dure par suite de trop fréquents arrosements.

Les fruits viennent assez bien la localité. Les châtaignes et les pommes qui sont justement célèbres donnent des produits abondants.

La plupart des légumes réussissent bien dans les jardins ; ils procurent aux ménages qui vont les vendre à Bagnères, une source précieuse de revenus.

On cultive la vigne sur la Serre-Devant, mais sans succès ; le rapport qu'elle donne ne couvre pas les frais de son entretien. Cela provient de sa mauvaise exposition au couchant, de la nature du terrain et de la température trop peu élevée pendant l'été. Le philloxéra (sic) n'a pas encore fait son apparition mais l'oïdium fait depuis longtemps des ravages dans la contrée : on n'emploi pas assez le souffre pour arrêter ses rapides progrès.

Les animaux domestiques ne sont pas assez soignés faute de principes de la part des paysans, de fourrage et de pâturage, etc.

Voici le tableau des animaux existant actuellement :

Poulains et pouliches de moins de 3 ans ............. 33
Chevaux........................................................... 12
Juments............................................................ 40
Mulets................................................................ 3
Ânes et ânesses................................................. 54
Veaux..............................................................100
Boeufs.............................................................. 45
Vaches.............................................................310
Brebis et moutons.............................................400
Porcs.............................................................. 350
Poules........................................................... 2000
Dindons............................................................ 25
Canards........................................................... 300
Lapins domestiques...........................................250

L'Adour et les gaves nourrissent beaucoup de truite dont la chair est de qualité supérieure : elles tendent à disparaître par suite des procédés frauduleux qu'emploient beaucoup de pêcheurs peu consciencieux.

La contrée serait assez giboyeuse, mais les chasseurs sont si nombreux dans ce pays que le gibier devient rare de plus en plus.

On exploite beaucoup de terre à foulon, quelque peu de marne et une assez grande quantité de sable ; l'extraction de ce dernier a lieu particulièrement dans le lit de l'Adour ; toutefois, on commence à extraire du sable des hauteurs que l'on dit excellent.

Deux scieries et une marbrerie peu importante sont les seules usines de Pouzac. C'est peu pour un pays qui possède tant de cours d'eau.

La route nationale De Bagnères à Tarbes, traverse Pouzac du sud au nord parallèlement à l'Adour qui longe les côteaux de l'est. Plusieurs autres voies de communication s'en détachent et se dirigent dans tous les sens. Les diverses routes et chemins vicinaux sont en bon état excepté quelques chemins d'exploitation des montagnes lesquels se trouvent souvent ravinés par les pluies et obstrués par les éboulements de terre ou de pierres.

Depuis que la voie ferrée qui longe l'Adour est établie, les habitants n'ont plus des voitures de transport. Ils vont à pied à Bagnères et prennent le train pour aller à Tarbes.

Le commerce est à peu près nul ; quelques épiceries de peu d'importance vendent leurs mauvais produits bien cher ; une boucherie donne de la viande pendant l'hiver ; deux marchands de vaches et un marchand de bois font quelques affaires.

On peut mentionner la vente des miches que les femmes de Pouzac font avec du petit millet, et qu'elles cèdent aux Bagnérais qui en sont très friands, moyennant un franc le gâteau du poids d'un kilogramme.

IV


L'histoire de la commune se perd dans la nuit des temps. Une légende fort ancienne dit que Pouzac se trouvait autrefois sur la rive droite de l'Adour, dans la partie de la Serre-Devant désignée aujourd'hui sous le nom de Las Gleysettes (probablement les petites églises).

La pioche et le soc de la charrue ont, en effet, mis à découvert il y a une cinquantaine d'années, au moment où l'on défrichait ce quartier, de nombreux ossements, des morceaux de fer, des débris de poterie ; mais personne n'était là pour interroger ces restes des autres âges.

On croit généralement que ces anciens habitants firent mauvais accueil aux armées de César, et qu'il essayèrent même de les refouler. Ayant reconnu la résistance impossible, ils auraient pactisé avec les étrangers, et peu à peu seraient venus se fondre avec la colonie romaine qui avait dressé ses tentes au pied du mont sur lequel l'armée campait, et appelé depuis Camp de César.

Pouzac a changé plusieurs fois de nom. Diverses pièces conservées aux archives de la mairie donnent : au commencement de ce siècle, Poussac ; cependant, sous la Révolution, on écrivait déjà Pouzac. Le registre des actes de baptême, de mariage, de décès, tenus par les desservants et écrits en français donnent, de 1663 à 1750, paroisse de Pousat ; dans un acte de 1457 on lit Posat.

Posat vient très probablement du patois local. Dans cet idiome, ce mot signifie " posé ". Pouzac voudrait donc dire : posé près du mont.

Au moment où il a été posé à son emplacement actuel, Pouzac ne se composait que d'une vingtaine de maisons à peine. Au commencement du XVII e siècle, le chiffre de la population ne devait pas dépasser deux cents habitants. Les registres de l'État-civil n'enregistraient chaque année que quatre ou cinq naissances et autant de décès. Mais comment savoir si ces registres étaient régulièrement tenus.

Faute de mairie convenable, chaque maire devait tenir chez lui les actes municipaux. Rien d'étonnant alors à ce que ces actes aient disparu pour la plupart ; encore ceux qui restent sont-ils dans un état plus que pitoyable. Les plus anciens registres contenus dans les archives ne remontent qu'à 1790.

Le cadastre de la commune fut dressé cette année, conformément à une délibération du conseil du 20 juin de la courante année.

Une adresse fut aussi adressée aux représentants de la nation ; nous sommes heureux de pouvoir en donner le texte même.

" Adresse aux représentants de la nation française :


Messieurs,

Nous adhérons de grand coeur à tous vos décrets. Nous et nos enfants nous les relirons sans cesse. Nous relirons toujours avec entousiasme votre déclaration des droits de l'homme. Ainsi donc nous sommes hommes. Ainsi donc tous les hommes sont libres et égaux en droits. Ainsi donc l'homme aux parchemins ne regardera plus avec un orgueil insultant l'honnête Laboureur qui toute l'année sue pour le nourrir, et de détestables rapports de l'administration ne tutoieront plus d'un ton humiliant les habitants des campagnes qu'ils opprimaient de mille manières. Le cultivateur, méprisé, tourmenté, accablé d'impôts donnait un autre état que le sien à ses enfants, sentant le malheur de sa condition, il ne voulait pas la leur transmettre. Dans la nouvelle constitution son état sera bon, sa condition honorable, le fils du laboureur sera laboureur. Les campagnes seront plus peuplées. Les villages augmenteront, les villes diminueront et nous ne verrons plus en france un million d'hommes rassemblés dans un petit espace pour se heurter et s'infecter. Les terres incultes seront défrichées, les champs mieux cultivés. Tous les ans, la quantité de fruits de la terre augmentera. Nous n'aurons plus à craindre les horreurs de la famine.

La force de l'État augmentera ; car les laboureurs sont très forts. Leurs bras nerveux exercés par l'agriculture sont le plus fort rempart de la Liberté.

Les moeurs seront plus pures : une famille de laboureurs est l'asile de la vertue. Il est encore dans la nouvelle Constitution un autre moyen de rendre les hommes vertueux ; nous n'élèverons aux charges publiques que les hommes qui s'en seront montrés dignes par une longue conduite sans reproche. Il est donc bien vrai qu'une bonne constitution est la source de bonnes moeurs, comme les bonnes moeurs en sont le plus ferme appui !

Dans la nouvelle Constitution les fortunes excessivent diminuent, les petites augmentent, le faible est à l'abri des insultes du fort.

Les pauvres trouveront dans les bureaux et ateliers de chârité des secours infaillibles. Les dettes de l'État seront acquittées. Les ministres de l'Église sont rappelés et de l'opulence et de la pauvreté dans une médiocrité plus conforme à la religion. Ceux qu'un trop riche bénéfice condamnait à l'oisiveté travailleront, et ceux qui travaillent auront de quoi vivre. Tout rentrera dans l'ordre et nous serons heureux.

Nous pourrons donc cueillir notre récolte quand elle sera mûre et certains hommes ne nous forceront plus, après sa mâturité de la laisser encore à la merci des voleurs, des oiseaux... et des intempéries de l'air parce qu'il ne leur plaisait pas encore de faire ramasser le dixième que nous leur donnions ; ils ne pourront plus nous inquiéter dans le partage. Sages législateurs, vous avez aboli cet abus !

L'Adour a ravagé nos champs et nos prairies le 13 de ce mois. Soumis aux décrets de la providence ; nous nous gardons bien de murmurer contre elle. Quoiqu'on ait dit que les laboureurs n'avaient de l'espèce humaine que la figure ; qu'ils étaient grossiers, stupides... nous avons appris par nos réflexions que le vent, la pluye, les innondations, la grêle, le tonnerre, sont des événements qu'aucune institution humaine ne peut ni produire ni empêcher, ni accélérer, ni retarder. Nos travaux sont assidus, opiniâtres et les secours de nos amis répareront toutes nos pertes.

Un usage ancien nous faisait aller tous les ans à Médoux en procession, le jour de la Trinité. M. l'Évêque de Tarbes abolit, il y a quelque temps, les processions de cette espèce.

Cette année on a répandu dans les campagnes que les récoltes avaient été mauvaises depuis cette abolition ; qu'il y avait d'autres moyens d'avoir d'abondantes moissons que de rétablir ces processions. Vite, quelques villages nos voisins chez M. l'Évêque ; demandent la permission et l'obtiennent sans difficulté, sans même que les députés fussent munis de délibérations de la commune. Nous l'avons obtenue nous aussi cette permission de la même manière et le jour de la Trinité nous fûmes à Médoux en procession. Quatre bannières nous précédaient : sur la première qui était Blanche, étaient gravés en grandes lettres ces mots : la Nation ; sur la seconde bleue, La Loi ; sur la troisième Rouge, le Roi et sur la quatrième aux trois couleurs de la Nation : La Nation, La Loi, Le Roi.

Tous les hommes, le vicaire même, avaient des cocardes aux trois couleurs de la Nation ; toutes les filles des rubans aux trois couleurs de la Nation ; à toutes les torches étaient suspendues des cocardes aux trois couleurs de la Nation. Nous marchions avec ordre et décence, d'un pas ferme. La joie de la liberté brillait sur tous les visages. Ainsi nous traversâmes deux fois la ville de Bagnères. Les ennemis de la Révolution qui nous virent, frémirent et tremblèrent, et ceux qui avaient répandu dans les campagnes qu'il n'y aurait ni blé ni milloc sans processions, voient bien que nous ne sommes point dupes et que nous sommes loin de nous égorger pour leurs intérêts.

Autrefois nous regardions comme très excessives les taxes qu'on nous imposoit. C'était toujours avec douleur et répugnance que nous les payions, parce que répétait que le Trésor Royal était pillé. Aujourd'hui, les plus grands sacrifices ne nous coûtent rien. Tout ce que nous avons, nous le vouons à la Patrie. Armés de fusils, de fourches, de faux, de tridens, nous sommes prêts à marcher contre nos ennemis. Qu'ils se présentent nous engraisserons nos campagnes de leur sang. Périssent les aristocrates qui veulent dissoudre l'Assemblée Nationale, nous éloigner de l'administration pour rétablir le régime oppresseur qui nous faisait leurs esclaves.

Continuez sages législateurs ! Vôtre courage n'a pas besoin d'être soutenu, les adhésions et les applaudissements ne peuvent augmenter votre amour pour la patrie et les protestations contre vos décrets, signées par des hommes qui ne méritent plus de porter le glorieux nom de français ne peuvent diminuer la confiance que vous avez acquise par votre sagesse.

Nous sommes sensiblement touchés du merveilleux patriotisme de notre bon Roi. Qu'il vive pour le maintien de la constitution ! Comme lui, nous avons tous juré hommes et femmes d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi et de maintenir de toutes nos forces la constitution du Royaume.

Vive la Nation !
Vive la Loi !
Vive le Roi !



De Pouzac dans le canton de Bagnères, le 20 juin 1790


Signés : Claverie, maire, Pinac, Adour, Condat, Perrouy, Péré, Pécassou, Broca, Adour, Lhossun, Perez, Pinac docteur médecin fils de laboureur, officiers municipaux et Lacour, secrétaire greffier. "


De pareils documents se passent de commentaires.


A la suite de cette adresse, on trouve aux dates indiquées des délibérations ayant pour objet :

- 14 juillet 1790 - Serment fédératif fait par la municipalité ;
- 10 septembre 1790 - Arrêté portant soumission à l'Assemblée Nationale pour acquérir des biens nationaux ;
- 1er 9bre 1790 - Serment pour le maintien de la constitution du Royaume, prononcé par le maire ;
- 17 9bre - Prestation de serment de la nouvelle municipalité. etc. etc.

Il serait facile de reconstituer l'histoire détaillée de la municipalité sous la Révolution. Les actes administratifs très soigneusement rédigés et bien conservés composent un recueil des plus curieux.

Depuis l'Empire, l'histoire municipale ne présente rien d'intéressant. Les diverses municipalités qui se sont succédé ont tout simplement administré conformément aux lois et décrets.

A Pouzac est né Laffaille, officier général du génie, homme de grande valeur et de beau caractère. Élève de l'École de Mars, qui précéda l'École Polytechnique, il entra dans l'armée du génie, fit les grandes campagnes de la République, celle d'Anvers, etc.

- participa aux travaux du comité des fortifications, conquit chacun de ses grades par ses actes et par sa seule valeur. Doué d'un esprit supérieur, mais en même temps d'une austérité complète de principe et d'une indépendance inflexible d'idées, il fut du petit nombre de ceux qui méritent plus qu'ils n'obtiennent. Des infirmités précoces le condamnèrent à la retraite. Il se retira dans son village natal, où il mourut, comme il avait vécu, respectable et respecté. Il avait légué sa bibliothèque à l'école communale et assuré un encouragement annuel de 50 fr. à l'instituteur, afin d'avoir " toujours un sujet capable et distingué. "

Il n'existe aujourd'hui de la bibliothèque Laffaille qu'une dizaine de volumes complètement oubliés dans un recoin de la mairie. Les élèves n'auraient ni profit ni plaisir à les lire.

Les habitants de Pouzac ne parlent guère que le patois du (sic) Bigorre ; beaucoup d'entre eux sont incapables d'entretenir une conversation quelconque en français ; tout au plus peuvent-ils répondre dans leur langue locale.

Pouzac avait autrefois sa fanfare, supérieure, paraît-il, à celle de Bagnères. Elle tomba faute de chef. Aujourd'hui il n'y a ni fanfare ni orphéon. Les chanteurs cependant ne font pas défaut. Il n'est pas rare, le soir, de voir les jeunes gens réunis par groupes en train de rendre, sinon avec talent, du moins avec force :

- Montagnes Pyrénées,
- La haou sus las montagnes,
- les Paysans,
- les Enfants de Paris,
- sur les Remparts etc...etc.

Souvent aussi ils se cherchent chicane sur de charmants jeux de mots, sur des devinerettes (sic), mille petites choses pleines de saveur.

" Les habitants des Pyrénées, rapporte Strabon, étaient supérieurs à tous les autres peuples, lorsqu'il s'agissait d'intelligence et d'activité, et ne se faisaient pas moins remarquer par la simplicité de leurs moeurs. "

Tels sont encore les Pouzacais. Doués en général d'une grande activité morale, d'une vivacité extraordinaire, d'un caractère fier, généreux, plein de franchise, ils aspirent surtout à l'indépendance. Continuellement en contact avec les Bagnérais, ils n'ont pas su garder la simplicité de leurs pères ; ils ont pris à ceux-ci les habitudes et les modes ; les moeurs ont dégénéré.

Ce qui a beaucoup changé surtout c'est le costume. Le drap a remplacé le cadix ; l'habit français a succédé à la veste à pans ; les chapeaux et les bérets ont pris la place des casquettes et des bonnets phrygiens.

Les femmes aussi ont suivi le courant. Et ma foi, le dimanche, les promeneurs Bagnérais disparaissent dans l'uniformité de la masse.

Tous les habitants appartiennent au culte catholique. Mais le libre examen gagne du terrain chaque jour.

Plusieurs chefs de famille se conduisent en libre-penseurs ; beaucoup d'autres se cachent un peu plus, mais le bout de l'oreille perce.

A côté des avant-coureurs, il faut mentionner l'arrière garde qui a pour capitaine superstition.

Les vieilles femmes répètent encore de nombreuses histoires de fées et de sorciers ; elles donnent même des faits à l'appui. Il va sans dire qu'il est toujours inutile de remonter aux preuves.

Bon nombre d'hommes racontent que César combattit longtemps contre Bayard ; le camp du grand capitaine français est posté par eux sur la rive droite de l'Adour. Toujours d'après leurs témoignages, les canons de César auraient vaincu.

Les vieux parlent plutôt morale ; le langage des maximes leur convient beaucoup. En voici quelque-unes :

Qué baou mès paga a haouré qu'a a haourillou.
Mieux vaut payer grand forgeron que petit.
(Il vaut mieux payer cher un bon ouvrier, que bon marché un mauvais).

Quant ét malhur né bao, u pouy qu'estranglaré u azou.
A la mâle heure, il ne faut qu'un pou pour étrangler un âne.

Qué baou més canta dat u lè qué ploura dab u beroy.
Mieux vaut chanter avec un laid mari que pleurer avec un joli.

etc...

Les monuments ne sont pas nombreux dans la commune. L'église date de 1548. C'est une construction qui menace ruines. Elle est bâtie sur l'emplacement de l'église brûlée en 1545. Le clocher date de 1833 ; il mesure une trentaine de mètres. A vingt mètres du sol, il porte une galerie d'où l'on jouit d'un assez beau coup d'oeil.

Plus loin il a été parlé du château de Cassan, aujourd'hui à M. le comte de l'Angle, et de la mairie.

Devant la maison Lacour on voit la colonne élevée à la mémoire du Général Laffaille. C'est une très belle pièce fournie par la marbrerie Géruzet.


Annexe au titre IV


Enseignement

Pouzac autrefois ne possédait pas d'école communale. Les familles aisées envoyaient leurs enfants à Bagnères ou ailleurs ; la classe pauvre était dans l'ignorance la plus complète.

Au commencement de ce siècle, quelques maîtres particuliers, sachant lire, écrire et faire les quatre règles, se chargèrent d'instruire les enfants moyennant rétribution. Ils faisaient peu ; mais quel maigre salaire ! Une mesure de froment et une autre de maïs par élève et par an. Aussi, pour vivre, ces pauvres régents devaient-ils faire autre chose. Généralement ils étaient barbiers, et trouvaient ainsi moyen de déjeuner ici, de dîner là.

Les archives de la commune ne renferment point de pièce mentionnant la plus petite subvention pour l'enseignement primaire. On tenait peu de compte de ces instituteurs toujours perruquiers ou chirurgiens.

Le procès-verbal d'une séance du conseil municipal de la commune en date du 15 mars 1818, est suivi de l'acte ci-après :

" Académie de Pau, - instruction Primaire - autorisation spéciale - nous Recteur de l'académie, vu les pièces a nous transmises par le comité de Bagnères département des hautes-pyrénées concernant le sieur Peyret (Dominique), natif de Pouzac - muni du brevet de capacité du troisième degré, vu l'article 13 de l'ordonnance royale du 29 février 1816 ; accordons au dit sieur Payret Dominique l'autorisation d'exercer les fonctions de l'enseignement primaire dans la commune de Pouzac, section d.

En qualité d'instituteur communal - Cette autorisation a été agrée par M. le Préfet conformément aux dispositions de l'article cy-dessus mentionnés fait au chef-lieu de l'académie le 16 février 1818. Jourdan signé par M. le Recteur - le secrétaire de l'accadémie Domengé signé - nota le présent titre devra être transcrit sur les registres de la mairie, il ne pourra servir que pour la commune ou section de commune qui y est indiquée. "



Le registre des délibérations - 1818 au 12 mars 1820 contient le procès-verbal suivant :

" Séance du Conseil Municipal de la commune de Pouzac du premier juin 1819.

Le maire a donné lecture d'un acte, sous signature privée, à la date du 8 mai 1819, qui lui a été adressé par Monsieur le Sous-préfet d'arrondissement et par lequel Monseigneur l'Évêque de Saragosse en Espagne, actuellement en résidence à Pouzac, propose à l'administration de vouloir l'autoriser à fonder dans notre commune deux petites fêtes annuelles consacrées à la récompense de la vertue, par l'emploi d'une rente qu'il est dans l'intention d'acquérir sur l'état, un Capital de cinq cent francs, et d'appliquer comme moyen d'émulation, par les prix que Monseigneur y propose, à l'enseignement des petits enfants et des petites filles de notre commune envoyés à notre école primaire, et après avoir fait sentir à l'assemblée combien sont ingénieuses et touchantes par leur but les deux cérémonies proposées par Monseigneur l'Évêque de Saragosse dans son acte de fondation. Combien elles méritent de remerciements de la part de tous nos pères de famille qui doivent bien vivement sentir qu'une éducation fondée sur le développement des qualités morales Monseigneur l'Évêque de Saragosse se propose de couronner par sa fondation, est le bien le plus précieux qu'ils puissent transmettre à leurs enfants, le Maire a proposé au Conseil municipal d'émettre son voeu sur la fondation proposée par Monseigneur l'Évêque de Saragosse.

Le conseil municipal de la commune de Pouzac en considération combien sont propres à donner l'émulation aux jeunes élèves les plus honorables dont Monseigneur l'Évêque de Saragosse daigne gratifier notre école primaire, en aliénant pour cela un capital de cinq cent francs est d'avis d'accepter le don de la rente proposée par Monseigneur l'Év≖que de Saragosse dans l'intérêt de notre instruction publique.

Considérant aussi, d'un autre côté, que cet acte de bienfaisance, qui a sa source dans la réunion de toutes les vertus épiscopales qui se font si éminemment remarquer dans la personne de Monseigneur l'Évêque de Saragosse, impose à la généralité d'habitants de Pouzac, comme pères de famille, un tribu éternel de reconnaissance envers le très respectable prélat qui veut ainsi devenir un nouveau protecteur de notre instruction primaire délibère :

Le conseil municipal réuni se rendra en corps auprès de Monseigneur l'Évêque de Saragosse pour lui adresser au nom de la généralité d'habitants de Pouzac, de sincères et très respectueux remerciements pour l'acte de bonté dont il honore notre école.

Le Conseil municipal invite aussi M. l'instituteur à vouloir se rendre à la tête de ses élèves auprès de Monseigneur l'Évêque de Saragosse, pour lui exprimer en présence de ses élèves, et en devenant l'interprète de leurs sentiments à ce sujet, toute leur reconnaissance et leur juste sensibilité pour un bienfait, un bienfait qui va donner un nouveau relief à ses leçons par les encouragements que Monseigneur l'Évêque de Saragosse daigne y attacher.

Un double de la présente délibération sera envoyé à Monseigneur l'Évêque de Saragosse. Ainsi délibéré à la mairie de Pouzac les jours, mois et an susdits."



Ce legs est aujourd'hui lettre morte, et cela depuis plusieurs années, très probablement par négligence du conseil municipal. Il est même à peu près certain qu'à l'heure actuelle, sans les recherches nécessitées par ce travail, personne dans la commune n'en soupçonnerait l'existence.

Le premier instituteur communal de Pouzac eut pour successeur M. Parade.

Dans une séance du conseil, en date du 8 février 1845, Monsieur le Maire annonça au conseil que M. Parade instituteur communal, avait déposé entre ses mains, à la date du 10 Octobre 1844, la démission des fonctions qui lui étaient confiées. M. le Maire ajoute :

" Qu'il était important de faire un bon choix pour remplacer M. Parade parce que de ce choix dépendait l'avenir intellectuel des enfants. Plusieurs pères de famille et des personnes recommandables de la commune pleines de sollicitude pour l'instruction de la jeunesse, m'ont manifesté le désir de voir venir parmi nous, pour diriger notre école communale, Mr Toujas, directeur de l'enseignement mutuel de la ville de Bagnères. "



Dans cette même séance on vota pour le service de l'enseignement, outre le logement de l'instituteur, un traitement annuel de trois cents francs, à prendre sur les revenus communaux - MM Peyret et Parade recevaient deux cents francs, plusieurs personnes âgées l'affirment du moins. Le conseil fixa encore à neuf francs la rétribution annuelle des élèves prenant des leçons de lecture et d'écriture, et à six francs celle des élèves qui prenaient des leçons de lecture seulement. Pouzac ne devait avoir d'institutrice communale qu'en 1850. On lit sur le registre des délibérations, à la date du 10 mai 1849 :

Le Conseil municipal

" Considérant que la réclamation adressée à M. le Maire par un grand nombre de pères de famille est toute dans l'intérêt de la généralité des habitants de la commune, que la place de l'institutrice communale mise au concours ne pourra que nous donner un sujet capable de remplir ses fonctions, et que l'administration locale aura le droit de surveiller, ce qu'elle ne peut faire si l'institutrice est privée...

Considérant que depuis bien longtemps les institutrices particulières sont un sujet de division dans la commune, que pour faire cesser cette division et dans l'intérêt des enfants, il convient d'avoir une institutrice communale, et pour éviter toute intrigue et agir avec justice de mettre la place au concours.

Par ces motifs, le conseil municipal délibère à l'unanimité qu'il y aura un concours ; que les matières du concours seront les mêmes que celles qu'on exige pour recevoir une institutrice et que le sujet qui l'emportera dans le concours sera présenté à l'autorité compétente, aux fins de lui faire obtenir le titre d'institutrice communale ; et charge M. le Maire de toutes les diligences à faire à ce sujet."



Conformément à cette délibération, un concours eut lieu à l'effet de nommer l'institutrice communale. Les résultats de ce concours furent portés à la connaissance du conseil le 1er janvier 1850.

" ...Marie-Jeanne Lagrange interrogée pendant deux heures consécutives, par une commission d'examen de votre choix, a fait preuve d'intelligence et de savoir ; et la commission l'a proclamée publiquement capable de remplir avec distinction, les fonctions d'institutrice communale. Conséquemment, je (Monsieur le Maire) viens vous proposer de solliciter de Mr le Recteur de l'académie de Toulouse, en faveur de Melle Lagrange, le titre d'institutrice communale pour la commune de Pouzac ; je vous propose en outre, pour venir au secours des pères de famille et pour encourager Marie-Jeanne Lagrange dans l'accomplissement de ses devoirs, d'accorder à cette demoiselle outre le logement et la salle d'école, une somme de cent francs par an."



Au moment où Melle Lagrange fut nommée institutrice communale, il y avait à Pouzac, deux institutrices libres Melle Broca et Melle Forêts. Nous ne saurions dire si elles prirent part au concours ; personne dans la commune n'a pu nous renseigner à ce sujet.

En 1852, le conseil municipal fixa le taux de la rétribution scolaire à payer par chaque élève à la somme de neuf francs ; il arrêta ensuite le traitement et le supplément de traitement de l'instituteur, le produit de la rétribution scolaire
compris, à la somme de .............................. 600 fr
l'indemnité de logement à ............................. 30 fr
La commune fournit la salle d'école Total ....630 fr


il arrêta également que cette somme serait prélevée, savoir :

1° sur le produit de la rétribution scolaire ................................ 225 fr
2° sur les revenus ordinaires de la commune ............................180 fr 01
3° sur le produit des 3 centimes communaux pour l'instr. pre. ... 119 fr 99
4° sur la subvention à fournir par l'État ................................... 105 fr
                                    Balance.............................................630 fr

Le 16 mai de la même année, le conseil municipal, réuni en vertu d'une lettre de M. le recteur à la date du 13 mai,

" aux fins de donner son avis sur l'objet de la dite lettre, qui est de savoir si la municipalité désirait que l'école communale fut dirigée par un instituteur laïc ou par un membre d'une association religieuse."



délibéra à l'unanimité des membres présents :

" qu'il désire que l'école communale soit dirigée par un instituteur laïc comme cela a toujours été dans la commune."



En 1853, la rétribution scolaire et le traitement de l'instituteur demeurent les mêmes. Cette dépense devant être réglée de la manière suivante :

1° sur produit présumé de la rétribution scolaire ................280 fr
2° sur revenus ordinaires de la commune..........................180 fr 01
3° sur le produit des 3 centimes pour l'instr. pre.................119 fr 99
4° sur la subvention à fournir par le départt ou par l'état.......80 fr
                        Total.................................................... 630 fr.

Les budgets de 1854, 1855 et 1856, en ce qui concerne l'enseignement, sont la reproduction du budget de 1853.

En 1856 le taux de la rétribution scolaire est élevé à 9 f 60.

En 1857, 1858, 1859, 1860 le traitement et le supplément de traitement de l'instituteur sont portés à la somme de 680 fr. ; cette somme descend à 600 f en 1861 et 1862 et atteint 700 fr en 1863, 1864, 1865 et 1866.

Durant ce temps le traitement annuel de l'institutrice était de 200 fr.

Déjà en 1864 le conseil municipal avait voulu rendre gratuite l'école de garçons sans y réussir. Une nouvelle délibération, du 13 mai 1866 réclame la gratuité ; enfin, le 8 juin 1866, le traitement de l'instituteur communal est fixé à 900 fr. et la commune le prend à sa charge.

En mai 1867, une pétition fut adressée par des pères et mères de famille au conseil municipal, pour demander que l'école publique de filles dont la direction avait jusqu'alors appartenu à une institutrice laïque fût confiée à l'avenir à des soeurs de chârité.

Mr Lucien Lacour remit, pour être insérée à la délibération, une protestation énergique dont voici les dernières lignes :

" Pour moi, Messieurs, je ne m'associerai jamais à de pareils actes. Je combats énergiquement la pétition de Mr de l'Angle. J'ose espérer que la majorité du conseil fera comme moi, agissant ainsi conformément à la justice..."



Le conseil donnant suite à la susdite pétition, vota sur le budget de 1868, pour le traitement des trois soeurs auxquelles sera confiée la direction de l'école de filles, une somme de 600 fr.

Pouzac attend encore, heureusement, les nouvelles directrices.

Enfin le 6 février 1876, le conseil décide que les écoles seront gratuites ; et il vote le traitement des instituteurs (il y avait un instituteur-adjoint depuis 1863) et de l'institutrice conformément aux bases indiquées dans la loi du 19 juillet 1875, ainsi que les 4 centimes exigés par cette loi.

Aujourd'hui, grâce aux efforts de l'administration municipale et au bon vouloir de l'État, Pouzac possède un des plus beaux groupes scolaires du département.

Construit à deux reprises différentes, 1863 et 1885, il a nécessité une dépense totale de 57.875 francs non compris la valeur du sol.

Son emplacement est des mieux choisis. Placé au centre du village, le bâtiment scolaire est orienté au midi. Il domine de beaucoup toutes les maisons avoisinantes qui cependant comptent, elles aussi. Le rez-de-chaussée est occupé par quatre salles de classe : deux à l'aile est, celles des garçons ; deux à l'ouest, celles des filles.

Avant la classe et pendant les récréations, les élèves peuvent prendre leurs ébats dans deux jolies cours, séparées par un mur de 1 m 80. Si le temps est mauvais, on quitte la cour pour le préau. Mais ici, garçons et filles sont également mal partagés. L'exposition du nord est mauvaise ; il n'est pas rare de voir le sable de la cour transporté, comme par enchantement, en vrais tourbillons, sur les larges dalles que la pluie mouille, en moyenne neuf fois sur dix, sous un solide toit en belles ardoises de Labassère.

Le mobilier scolaire est en complète harmonie avec les locaux. Les deux belles salles de classe des garçons, séparées par une cloison en partie vitrée, sont garnies de tables à deux places établies d'après les indications données par le docteur Riant dans une conférence faite aux instituteurs, lors de l'exposition de 1878.

La collection complète des cartes murales de Vidal-Lablache , les tableaux d'histoire naturelle, de géométrie tapissent totalement les murs, sans compter les diverses étagères occupées par le musée scolaire et le compendium métrique.

Les salles de classe pour les filles, quoique moins richement ornées présentent cependant un mobilier complet. Tables à deux places, comme celles des garçons, cartes murales, tableaux synoptiques, méthodes de lecture, etc.

Maintenant, il n'y a qu'à suivre le progrès, se procurer successivement le matériel qui pourra être édité, et la chose marchera sans peine. Les sacrifices de la municipalité pour l'enseignement ont amené le plus heureux des résultats dans les familles. Les parents, illettrés pour la plupart, ont fini par comprendre la nécessité de l'instruction. Ils ne veulent pas que leurs enfants soient un jour comme eux, aussi les envoient-ils régulièrement en classe.

La fréquentation devient de plus en plus assidue. L'année dernière, l'école de Pouzac a donné huit certificats d'études primaires, avec un brevet de capacité et un élève d'école normale. Il est vrai qu'à côté de ces jeunes citoyens nous avions quatre conscrits illettrés, deux hommes et trois femmes parmi les conjoints, qui n'ont pu signer leurs noms.

L'école communale possède un commencement de bibliothèque depuis le mois d'août dernier. La commune a fait construire deux armoires bibliothèques de 2 m de haut, 1 m 50 de large et 0 m 40 de profondeur ; mais elle n'a encore rien pu faire pour l'achat d'ouvrages, de sorte qu'il n'y a d'autres volumes pour le moment que ceux qui ont été concédés par le ministre en août 1886. Encore ces livres, au nombre de 23, sont-ils peu propres à être lus par les jeunes écoliers. Il y a eu, dans le courant de cette année scolaire, cinquante-trois prêts faits surtout aux élèves du cours supérieur et à certains anciens élèves qui sont sortis depuis un ou deux ans. La caisse des écoles fonctionne régulièrement depuis 1884. Le conseil municipal vote chaque année la somme de 200 francs. Cet argent est employé pour les enfants indigents de la commune, filles ou garçons, en fournitures classiques : livres, cahiers, plumes, etc.

Dans le court exposé qui vient d'être fait de l'enseignement primaire, nous sommes partis de rien, du néant, de la négation même de l'instruction. Pas à pas, petit à petit, nous avons traversé l'espace d'un siècle. Quelle différence de la fin au commencement ! Une chose seule garde son caractère propre à travers les périodes : le traitement du régent. Les années s'écoulent, les procédés, les méthodes, les programmes d'enseignement changent, la besogne, la responsabilité, les dépenses s'accroissent tous les jours ; il n'y a qu'une seule chose qui ne change pas : le budget de l'instituteur. Sa vie est toute d'abnégation, disent les amis de l'enseignement ; la satisfaction morale que lui procure la certitude du devoir accompli est bien au-dessus de toutes les récompenses qu'on saurait lui accorder...et tant d'autres.

Tout cela est vrai ; ce sont de belles lignes sur le papier ; mais il n'en demeure pas moins vrai que le pauvre instituteur doit forcément vivre de privations. Attaché à sa classe, il doit vivre de sa classe. Peut-il le faire ? Peut-il, avec quarante-cinq sous par jour nourrir sa femme et ses enfants, se procurer les journaux et les livres d'enseignement sans lesquels un instituteur, quel qu'il soit, est condamné à se rouiller dans un bref délai ? Il serait oiseux de s'étendre davantage sur la situation critique des pauvres maîtres d'école. Il n'y a pas d'argent, crie-t-on sur tous les tons. Pour sûr, ils en savent quelque chose ; et il leur est bien permis de désirer des temps meilleurs.

Disons, en terminant, que la municipalité de Pouzac doit au plus tôt, couronner son oeuvre en créant une salle de gymnastique et un atelier de travaux manuels. La place sera facile à trouver. Il suffira d'acheter les appareils et les outils indispensables.

L'école sera alors ce qu'elle doit être ; elle pourra faire des hommes. Malheureusement cela lui a été impossible jusqu'à ce jour. Nous sommes tous à en souffrir, en attendant mieux. L'école c'est l'avenir, qui dit écoliers, parle de générations futures. Il vaut la peine de s'en occuper.

L'instituteur public

Trouette.




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de la Bigorre devenue Hautes-Pyrénées
département 65.
© Marie-Pierre MANET









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