Honoraires médicaux
aux XVIIe et XVIIIe siècles
(contrats notariés)
en Bigorre
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de Marie-Pierre Manet






[1]L'auteur traite d'abord du nombre élevé de praticiens en Bigorre au XVIIe siècle. La collection Fontan (archives départementales) révèle ce fait dans la plaine comme dans la montagne, même dans les village sans importance. A Tarbes, par exemple, sur quelque 5.000 habitants, 19 praticiens dont les noms sont donnés. Sans doute les épidémies de peste pouvaient justifier cette affluence, mais les bourgs faisaient le plus souvent, dans ce cas, appel à des spécialistes étrangers.

L'une des raisons, malgré son caractère paradoxal, pourrait être le taux relativement élevé des honoraires, dans ce pays de Bigorre pourtant très pauvre.

Ces honoraires étaient presque toujours payés en nature, mais il n'était pour les praticiens que de transformer les grains en deniers pour obtenir une rénumération pécuniaire de leurs soins.

Dans un long exposé, l'auteur indique les rapports existant entre les mesures, les sacs, leurs transformations en livres tournois, ainsi que les variations de ces valeurs aux XVIIe et XVIIIe siècle, Exemple : en 1653 (registre du notaire de Prat) le blé est à 20 livres le sac, et la livre tournois si on la rapporte au franc-germinal de l'an IV à 3 fr. 50 (d'après d'Avenel). Selon acte passé par devant Me Cazals, le docteur de Lassus touche pour 17 villagois de Marseillan, 17 mesures arases de blé. La mesure vaut 3 sacs et demi, soit 17 X 3,5 = 19,5 ; la livre était à environ 3,5 : 59,5 X 3,5 = 208,25. Le docteur de Lassus perçoit donc annuellement la valeur représentative de 208 livres 25 (la livre étant rapportée au francs-or). Et si l'on rapporte en dernière analyse ces 208 livres au franc papier de nos jours (environ 150 francs), le docteur de Lassus touchera : 208 x 150 = 31.237 fr.

La somme n'est pas bien élevée sans doute, mais la livre avait, à cette époque, de par son pouvoir d'achat une valeur d'achat infiniment plus grande que notre franc actuel. Une vache, dit d'Avenel, valait au XVe siècle, 19 sous, un mouton 2 sous 7 deniers, une grosse perle coûtait 22 sous, une petite 2 sous, etc. Une tapisserie de Gobelins, en 1858, qui vaudrait aujourd'hui au moins 300.000 francs, se vendait 400 à 450 francs.

Les Archives départementales possèdent à la Série C un document intéressant. C'est une délibération des États de Bigorre datée du 10 mars 1636 qui réglemente les indemnités accordées aux médecins de la province (ceci, après une grève des médecins). Tout médecin "allant hors Tarbes, aux champs et dans le pays" ne devait percevoir que quatre quarts d'écu par jour : à Bagnères, Lourdes, Vic : deux ; pour toute ordonnance dans les villes de la résidence : un quart.

L'écu change de valeur, lui aussi, selon les époques. En 1636, il était côté à 6 livres 23 ; le quart était donc de 1 livre 55. Si l'on applique la table-barême de l'Avenel, on voit osciller la livre de 4,75 à 5,20 par rapport au franc de germinal an IV. Donc toute ordonnance valait 5 (chiffre moyen) X 1,55 soit 7 franc-or. Aligné sur le franc actuel, elle correspond à 7,75 x 150 ; la fourniture de la potion (ou apozème) y était toutefois comprise, le prix étant de 1 livre tournois environ.

Il n'en était pas toujours ainsi ; dans la collection Fontan (Archives départementales) nous trouvons un contrat passé en 1680 entre le chirurgien Soubirous (d'Argelès) et les moines de Saint-Savin (12 à 15 selon Meillon), dans lequel il est stipulé que "en échange des soins diligents : "rasures, saignées, remèdes et lavements" le dit Soubirous recevrait à la fête de Saint-André 3 sacs de froment, 3 de seigle et 2 d'orge, mais avec cet avantage que les jours de tonsure (en couronne) il lui serait offert de dîner " avec les mêmes viandes que la communauté". Quarante ans plus tard, cette allocation était pourtant doublée et le chirurgien Poymiro touchera 6 sacs de froment (Archives départementale, Série H, 1. 105)

Les paiements en nature ne semblent avoir concerné que les petites gens, les collectivités modestes ; les paiements en numéraire se faisaient aussi, ainsi qu'en témoigne un acte passé par devant le notaire Lateuillade en 1746, où les chirurgiens Duprat et Pérès se voyaient attribuer des honoraires " en monnaie tréuchante" par le curé de Cabanac et les sieurs de Carrère, de Lapaleu et Dupont.

Assurément, et surtout à cette époque, les résultats des cures ne correspondaient pas toujours, aux taux relativement élevé des honoraires : d'où discussion et parfois procès... A cet égard, un texte assez humoristique fut trouvé par Fontan dans les archives du notaire Byasson (d'Argelè). Un acte passé le 8 juin 1641 par le sieur Dominique Saluyé d'Arrens) spécifique que le dénommé veut bien payer la somme de 190 livres au chirurgien Louis Monet, mais sous réserve que 80 ne seraient trouchaient que si la guérison intervenait.

La fin de cette communication concerne les honoraires des chirurgiens dits de peste qui ont fait l'objet d'une étude parue dans le Bulletin de la Société Académique de l'année 1950-51.

Les railleries, parfois très acerbes n'ont pas manqué à l'égard de ces anciens praticiens. La Bruyère n'a-t-il pas dit : "Tant que les hommes pourront mourir et qu'ils aiment à vivre, le médecin sera raillé et bien payé".

Docteur J. Labougle






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Notes

[1] Source : Gallica.bnf.fr
Bibliothèque Nationale de France
Bulletin de la Société académique
des Hautes-Pyrénées
Société académique
des Hautes-Pyréneées - 1954


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© Marie-Pierre MANET






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