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La monographie de 1887 de la commune de Coussan
Hautes-Pyrénées
département 65.

(ADHP - Monographie établie en 1887)



Sceau
00036426
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Livre écrit à la plume
I


Le village de Coussan est situé au sud-est du canton de Pouyastruc ; il est borné au nord, par la commune de Marquerie, à l'est parcelle de Goudon, au sud, par cette dernière, celles de Gonez de Laslades ; à l'ouest, par cette dernière encore, celles de Souyeaux et de Hourc.


Sa forme est celle d'un rectangle irrégulier surtout au sud-est ; sa partie la plus longue dirigée du nord-ouest au sud-ouest a environ 2200 mètres ; sa largeur moyenne est d'environ 1400 mètres ; sa surface de 307 hectares, 11 ares 42 et son périmètre de 7200 mètres environ.


Sa distance au chef-lieu du canton est de 4 kilomètres et au chef-lieu d'arrondissement qui est en même temps celui du département, de 14 kilomètres.

Il est situé sur quatre collines ou coteaux dont trois ont leur direction de l'ouest à l'est, et la quatrième la principale, d'où ceux-ci se détachent, prend son origine au sud-ouest, longeant presque invariablement le ruisseau de l'Estéous, vers Rabastens.


Il n'offre, comme curiosités naturelles qu'un magnifique point de vue, d'où l'on aperçoit de tous les côtés presque jusqu'à l'horizon un grand nombre de communes du canton de Pouyastruc et de celui de Tournay.


Le sol est couvert d'une couche d'humus qui lui permet de produire une végétation variée, vigoureuse et abondante : forêts, vignobles, céréales de toutes sortes, prairies, tubercules, et tous les arbres fruitiers que l'on peut rencontrer dans le département y poussent aussi très bien. Sa surface présente donc un aspect très varié et certaines dispositions de sol que peut offrir notre département : on y voit des plaines et des vallées, des collines assez accidentées d'où découlent quatre petits torrents dont un le limite au nord. Un ruisseau le limite au sud et à l'est, et reçoit en même temps les eaux de ces derniers pour aller ensemble se jeter dans la petite rivière de l'Arros. L'ouest est également limité par un autre ruisseau ; mais tous ces petits cours d'eau n'ont qu'un débit moyen, insignifiant, n'étant alimentés que par les eaux pluviales d'une couche annuelle d'environ sept à huit cents millimètres ; aussi, les voit-on se dessécher facilement par l'évaporation amenée par le soleil de l'été, ou par la rareté des pluies pendant cette saison.


Comme eaux potables, on voit au fond des vallons de petites sources dont l'eau retenue dans des bassins sert à abreuver les animaux. Ces eaux qu'on capte encore dans des réservoirs plus soignés, servent à l'alimentation des habitants qui n'ont pu, chez eux, se la procurer au moyen de puits que l'on a dû creuser assez profondément dans le sol (de 15 à 20 mètres). Son altitude est de 335 mètres environ dans la partie la plus élevée ; par conséquent le vent qui peut le frapper avec force, surtout celui du sud-ouest et du nord-est, amène dans la température qui est en été de 25° et de 8° en hiver, certaines transitions dont la plupart des habitants de cette localité ont parfois à souffrir, et qui sans cela jouiraient sans inconvénient presque, de ce beau et doux climat dont notre département est caractérisé.

II


La population de Coussan est de 165 habitants ; rien ne semble indiquer que ce chiffre tende à diminuer ou à s'accroître. Le recensement de 1882 portait 159 habitants, d'où une augmentation de 6 individus, en 1886 ; mais dans les recensements antérieurs, une diminution s'accentuait sensiblement, attendu qu'on a vu baisser, dans l'espace de vingt ans, ce chiffre de plus de quarante habitants. Cela s'attribue, quelque peu à la mortalité numériquement plus importante que les naissances, et surtout à des émigrations dans les villes, en étranger même par des enfants de familles nombreuses qui auparavant ne désertaient point le foyer natal.


Il est divisé en quatre sections ou quartiers. Le premier, appelé quartier des Roubis, a une population de 89 habitants répartis entre 19 feux ; le second, la Carrère, en a 44 répartis entre 10 feux ou ménages ; le troisième, Paillas, en a 26 répartis entre 5 feux; et le dernier, Les Landes en a 6 répartis dans deux ménages : d'où un total de 36 feux.


En raison du peu d'importance, son organisation municipale ne comprend que dix conseillers, parmi lesquels un adjoint et un maire. Celui-ci a choisi son secrétaire en dehors de ce nombre. Le seul autre fonctionnaire, résidant dans la commune est le vicaire chapelain qui ne dessert que Cousssan.


Avant 1854, le service du culte se faisait par M. le curé de Marquerie, et alors, si on éprouvait bien des difficultés pour l'accomplissement de ce service, du moins la pénurie de la caisse municipale ne se faisait point sentir, car aujourd'hui celle-ci ne peut recevoir assez du produit de ses revenus communaux pour parer aux frais résultant de cette érection avantageuse sous le rapport de son fonctionnement et très onéreuse sous le rapport pécuniaire.


Il appartient à la perception de Pouyastruc et la résidence de ce fonctionnaire est fixée à Tarbes, depuis 1867 ; néanmoins, Coussan n'a pas à souffrir de ce changement de domicile, car ses habitants ont la faculté de se délibérer envers lui, tout en allant vendre leurs denrées aux marchés de cette ville qu'ils fréquentent, exclusivement presque, par suite de leur importance et de la facilité avec laquelle ils peuvent s'y rendre, tandis qu'auparavant, ils se rendaient au chef-lieu du canton uniquement dans ce but.


Pour les postes et télégraphes, il appartient au bureau de Cabanac depuis 1879, époque de la création de ce bureau. Il éprouve de la satisfaction à être desservi par ce bureau, attendu que la distribution des dépêches se fait de neuf à dix heures, alors qu'elle se faisait de une à deux heures, et on a une seconde levée de boîte deux heures après. Toutefois, ce service laisse beaucoup à désirer : le canton de Pouyastruc ne se trouvant pas sur la voie ferrée, il arrive ce fâcheux inconvénient, qu'une lettre jetée à la poste, à Tarbes, après le départ du courrier, arrive en même temps qu'une lettre partie de Paris, ce même jour.


La valeur du centime communal est 6F.91 et celle de ses revenus ordinaires de 7320 francs.

III


Cent vingt six hectares environ de terres labourables sont livrés chaque année, alternativement par tiers, à la culture des céréales, principalement du froment, à la culture du maïs et en jachères où l'on cultive généralement la pomme-de-terre.


Cette première partie donne en moyenne 360 hectolitres de blé qui permettent aux habitants de se suffire à peine.

La seconde partie en donne au moins autant dont le cinquième seulement peut être vendu, quant à la troisième, qui donne environ de 7 à 800 hectolitres, elle sert pendant les trois quarts de l'année à l'alimentation des habitants et surtout à l'élevage de certains animaux (les porcs) qui, seuls, produisent actuellement un revenu tant soit peu compensateur.


Mais toutes ces récoltes ne viennent qu'au prix d'un labeur constant et surtout très pénible pour le travailleur des champs, dont ses soins pour la terre, de nature argileuse en grande partie, n'ont de relâche tout au plus que le premier et le dernier mois de l'année.


Le froment ne vient d'une manière satisfaisante que sur jachères sur lesquelles on avait semé les pommes-de-terre, en rangées espacées d'environ deux mètres : ce qui a permis, à l'agriculture, d'ameublir et d'exposer aux rayons fertilisants du soleil, à plusieurs reprises, pendant l'été, au moyen de la charrue et d'autres outils aratoires, la couche d'humus qui devra recevoir en novembre la semence prochaine.


Il y a environ 60 hectares de forêts dont 30 appartiennent à la commune qui les a soumises au régime forestier. Un hectare est exploité et vendu, chaque année, au profit de la caisse communale. Ce produit est d'une valeur moyenne de 500 francs. L'essence où domine surtout le chêne, est de bonne qualité : on y voit aussi quelques hêtres, des houx et autres petits arbustes. De plus, on y remarque encore une dizaine d'hectares de châtaigneraies qui, dans le temps rapportaient beaucoup ; mais aujourd'hui ces arbres sont rabougris et dépérissants, et ceux qu'on remplace semblent ne point vouloir prendre les proportions de ces derniers qui mesuraient certains, de trois ` quatre mètres de circonférence.


Les soixante dix hectares de vignes qui, il y a à peine dix ans, donnaient par leur rendement l'aisance dans cette localité, ne fournissent plus qu'une récolte dérisoire et de mauvaise qualité, et la plupart des habitants ne cueillent plus leur consommation en vin. Cette perte est attribuée surtout au mildew, qui depuis 1883, a tout ravagé ; cependant à la dernière récolte, le mal semblait s'être un peu atténué d'abord, par suite du traitement au sulfate de cuivre (que l'on fit peut-être trop tard) et surtout par la température sèche, si favorable à la vigne, que nous eûmes dans cette région. Mais dix ou douze hectares situés sur le nord de la commune sont détruits par le phylloxéra qui fit sa première apparition cette même année et on craint même qu'à l'heure actuelle, il n'ait envahi d'autres quartiers : ce qui serait la ruine des habitants, vu que l'unique revenu important était le vignoble excroissant ordinairement sur des terrains très accidentés que l'on ne pourrait livrer à d'autres cultures.


Le restant du sol, environ 35 hectares, est couvert de prairies qui donnent un bon rendement en foin ; mais la seconde coupe est d'autant moins importante que l'été est sec, et même dans les prairies situées autour des habitations devient-elle nulle bien souvent ; aussi, se voit-on dans l'obligation de suppléer à ce manque en allant acheter des regains dans une région mieux partagée que nous, sous ce rapport, la plaine de l'Adour.


Comme animaux on voit le bœuf, la vache en petit nombre, le cheval, l'âne, le porc et quelques oiseaux de basse-cour ; mais on n'a guère que les animaux domestiques indispensables à l'agriculture, vu la rareté de nourriture dans un pays où les prairies font défaut. Cependant quelques propriétaires préparent, chaque année, l'hiver et le printemps suivant, quelque petit troupeau de moutons. On vend également quelque mulet ; mais ce produit est relativement de peu d'importance.


Dans le temps, c'était aussi un pays giboyeux : le lièvre, les perdreaux surtout y abondaient ; mais aujourd'hui, ce dernier gibier est devenu bien rare et tend même, je crois, à disparaître complètement. On attribue cela aux pluies abondantes qui détruisent les couvées pendant leur incubation. Dans les vallons, on y trouve aussi la caille qui serait encore assez abondante si elle n'avait à souffrir des mêmes intempéries que les perdreaux. On y remarque encore, de ces oiseaux de passage : ramiers, palombes, tourterelles, bécasses etc.


Comme animaux nuisibles, le renard et le blaireau s'y trouvent en grand nombre, mais leurs ravages destructeurs leur ont fait vouer une chasse toute particulière dont les effets les empêcheront de se propager, à l'avenir, dans les mêmes proportions.


Il n'existe pas de carrière exploitée, sauf quelques marnières dont le produit est employé pour l'amendement des terrains labourables, et encore aujourd'hui l'usage de la marne tend à disparaître.


On a comme voies de communication quatre chemins vicinaux qui sont en bon état d'entretien, grâce à une imposition extraordinaire de dix centimes et à une quatrième journée de prestations, où viennent s'ajouter les subventions du département et de l'État accordées proportionnellement aux sacrifices communaux que l'on s'est imposés. Un chemin d'intérêt commun traverse le sud de Coussan, et relie le village de Souyeaux au n° 29, route de grande communication qui va de Tarbes à Castelnau-Magnoac. Pour se rendre aux marchés ou bien là où le besoin l'exige, la plupart des propriétaires possèdent un attelage (soit avec cheval ou âne) qui leur permet de porter avec eux les denrées qu'ils ont à vendre. Le chemin qui aboutit au chef-lieu du canton n'est pas d'un accès facile, mais en revanche on est amplement dédommagé par la facilité que l'on éprouve à se rendre au chef-lieu du département, ayant une route de grande communication pour y aboutir.


On ne se sert pas de mesures locales autres que celles du système métrique, sauf l'ancienne balance romaine marquée par livres de 400 grammes chacune avec ses demies et ses quarts.

IV


Le village de Coussan est sans doute très ancien, et nous n'avons rien d'authentique nous décrivant sa formation primitive. Tout ce qui reste de vieux souvenirs, c'est que le tiers de son territoire faisait partie de la maison seigneuriale de Gonez, où l'on voit encore les ruines de ce château.


On se rappelle aussi quelque peu du passage des Anglais en 1814, mais rien d'important ne mérite d'être cité à ce sujet.


Faudrait-il dire quelques mots d'un tumulus qui se trouvait à l'ouest de l'église et qui aujourd'hui est cultivé ? On rapporte que le propriétaire de ce terrain trouva en creusant le sol, il y a quelques cinquante années, pour l'approprier à la culture, des poutres et des blés carbonisés, des pièces de monnaie, si anciennes, qu'on ne peut y reconnaître l'effigie ; le métal dont elles étaient composées fit qu'on n'attacha aucun prix à cette trouvaille, pas même celui de les conserver comme une curiosité.


On suppose que tout cela avait été enfoui pendant les guerres de religion qui troublèrent fort le pays en 1574 ; car l'ai vu quelque part que Lizier, le fils du charcutier de Montauban avait établi à Tarbes, son quartier général d'où il pressurait à merci les campagnes avoisinantes. Après avoir tué dans un guet-apens le gouverneur de Bagnères, il se prépara à venir pressurer Boulin, mais une légion se forma sous le commandement du chevalier de Mun dont le castel se trouvait sur la colline qui borne à l'est, le bassin de l'Arros. La troupe s'embusque dans le bois de Souyeaux qui couvre la colline, et quand Lizier passe avec sa bande, au signal donné, on se précipite sur l'ennemi. Le combat fut vif de part et d'autre, paraît-il, mais le chevalier de Mun ayant frappé Lizier au coeur, dans la mêlée, sa troupe se débanda et la victoire resta aux paysans du pays.


Ce fait d'armes eut, pour la Bigorre tout entière, un résultat inespéré : il lui conquit une tranquillité relative pendant un certain temps.


Le langage des habitants est le patois qui n'est pas un idiome tel que l'est le Languedocien, le Béarnais, le Basque ; c'est un composé du latin, du romain de l'espagnol et peut-être d'autres langues encore, aussi n'existe-t-il pas de chants. Ils pratiquent tous, avec plus ou moins de sincérité, le culte catholique, mais surtout s'attachant fort aux pratiques extérieures et se préoccupant du qu'en dira-t-on, comme du reste tous les campagnards du pays.


Cela ne les empêche pas d'être parfois, même trop élastiques, sous le rapport de l'intérêt, qu'ils prennent pour boussole, et de fouler aux pieds, au besoin, les règles de l'équité. Aussi, les voit-on, ces paysans, avec leur traditionnel béret, à larges ailes, et leurs gros sabots, déployer leurs ruses pour y faire entrer parfois (disent-ils) ces bons bourgeois qui souvent les regardent d'un œil dédaigneux ou moqueur. Ils vont dans un costume négligé, qui s'écarte même, quelquefois des règles de la convenance, sous un soleil de feu, ou au milieu d'un froid glacial, opérer leur labeur fatigant et indispensable. Ils sont forts et surtout très laborieux ; aussi, s'estiment-ils très heureux, si parleurs rudes travaux, ils peuvent parvenir à se procurer une alimentation à peine suffisante : du pain, de la pâte, du vin, du porc et de l'oie salés.


J'ajouterai qu'ils s'obstinent généralement encore à imiter leur père ou leur aïeul, ridiculisant même celui qui se montrerait quelque peu docile à la voie du progrès ; cependant une heureuse réaction commence à surgir, et l'instruction, qui se répand dans les écoles, achèvera de triompher de ces préjugés basés seulement sur la routine ignorante et coupable.


La commune possède une école publique mixte dont les locaux lui appartenant, sont dans un état satisfaisant. La fréquentation est bonne pendant l'hiver ; mais dans la saison agricole, la pénurie d'ouvriers fait qu'on se sert des enfants pour y suppléer, soit en les occupant, pour le travail de la terre, soit pour la garde des animaux. Néanmoins, l'instruction est en bonne voie : il n'y a pas d'illettrés parmi les conscrits ni les conjoints ; tous savent lire, écrire, et compter assez bien.


Le traitement du maître est de 1100 francs. Et les sacrifices à demander à la commune pour réaliser les améliorations nécessaires pourraient s'élever à la somme de 400 francs.

L'instituteur public

Dupont.




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© Marie-Pierre MANET









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